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Les contes populaires russes contiennent un grand nombre de symboles alchimiques. Selon mon humble idée, un des plus important symbole est Isis et Nephtys ou les 2 faces de ce même symbole, puisque tout est double ici bas. Les 2 sœurs ou l'Eau de Vie pour Isis, et l'Eau de Mort pour Nephtys.
Voici quelques pages, extraites des recueils de contes d'Afanassiév, lequel a été un grand rassembleur de ces contes populaires, collectés dans la Russie encore à demi analphabète du milieu du 19ième siècle et ils représentent ainsi la tradition orale comme aucun autre recueil n'a été en mesure de le faire depuis.

 

Comme dans tous contes, des philosophies et abstractions se dégagent. Ici par exemple, j'ai relevé la notion du temps, celui de Chronos et d'une manière de vivre et en accord avec le paysage de la steppe. Presque chaque contes contiennent :

Le temps passa-t-il vite ou non, conter, c'est vite fait, agir, c'est bien plus long.

Au bout d'un temps ni court ni long...

Le chemin fut-il bref ou long, le temps passa-t-il vite ou non...

 
             
Et dans ce pays ou la température est très rude, beaucoup de contes se terminent plus ou moins de ces façons :  

J'ai été invité, du miel et de la vodka j'ai voulu goûter, sur ma barbe ils ont coulé, dans ma bouche rien n'est tombé !

J'y étais, du miel et de la vodka j'ai voulu boire, sur ma moustache ils ont coulé, dans ma bouche rien n'est tombé. On m'a donné un bonnet et on m'a poussé par le collet ; on m'en a donné un autre et je l'ai jeté sous le portail ! Voici la fin du conte, donnez-moi un pot de miel.

 
     
  Voir aussi la classification Aarne-Thompson (AT) des contes :
http://www.chez.com/feeclochette/Theorie/aarne.htm
http://www.contemania.com/comprendre/classification_aarne-thompson.htm
     
L'OISELLE DE FEU ET LE LOUP GRIS
En un certain royaume en un certain État vivait le tsar Vyslav Andronovitch. Il avait trois fils : le premier s'appelait Dimitri, le second Vassili et le troisième Ivan. Ce tsar possédait un jardin si beau qu'il n'en existait pas de semblable. Dans ce jardin croissaient toutes sortes d'arbres rares dont certains avec des fruits ; entre tous ces arbres le tsar tenait a un pommier sur lequel poussaient des pommes d'or. Soudain, voici qu'un jour l'oiselle (le mot oiseau est féminin en russe) de feu se mit à venir dans le jardin du tsar ; chacune de ses plumes était d'or et ses yeux étaient pareils au cristal d'Orient. Chaque nuit, elle venait se poser sur le pommier préféré du tsar pour arracher une pomme d'or. Le tsar Vyslas en était très affligé. Aussi appela-t-il ses trois fils et il leur dit ceci : « Mes chers enfants ! Lequel d'entre vous m'attrapera l'oiselle de feu qui vient manger les pommes de mon jardin ? A celui-la, je donnerai tout de suite la moitié de mon royaume et, à ma mort l'autre moitié ! » Alors, d'une seule voix, les tsariévitchs répondirent : « Sire notre père ! C'est avec la plus grande joie que nous nous efforcerons de ramener vivante l'oiselle de feu ! »
La première nuit, ce fut le tsariévitch Dimitri qui alla monter la garde. Il s'assit sous le pommier aux pommes d'or, s'endormit et n'entendit pas venir l'oiselle de feu, qui picora pomme sur pomme. A son retour au matin, il déclara à son père : « Non, père, elle n'est pas venue cette nuit ». La nuit suivante, le tsariévitch Vassili se rendit à son tour dans le jardin. Il s'assit sous le pommier et, au bout d'une heure ou deux, il s'endormit si profondément qu'il n'entendit rien lui non plus. Au matin, il déclara au tsar : « Non, père, elle n'est pas venue cette nuit ! »
La troisième nuit venait le tour d'Ivan-tsarievitch. Il alla s'asseoir sous le pommier. Le voilà qui veille une heure, deux heures, trois heures tout à coup, le jardin s'illumine tout entier comme si de toutes parts mille feux s'étaient allumés : c'était l'oiselle de feu qui venait de se poser sur le pommier pour y becqueter les pommes. Ivan-tsariévitch s'approcha doucement et réussit à la saisir par la queue. Mais, lui échappant, elle s'envola à tire-d'aile et il ne resta en mains au jeune homme qu'une plume de sa queue. Au matin, il attendit le réveil du tsar pour courir lui porter la plume. Elle était si lumineuse qu'elle pouvait éclairer la chambre la plus sombre mieux que ne l'eussent fait une multitude de bougies. Le tsar en fit grand cas et commanda qu'on la mette dans sun cabinet particulier. Depuis lors, l'oiselle de feu cessa de venir dans le jardin.
A nouveau, le tsar Vyslas convoqua ses fils et leur dit ceci : « Mes chers enfants ! Partez à la recherche de l'oiselle de feu et ramenez-la moi vivante ! Je donnerai tout ce que j'ai promis a celui qui le fera ! » Les tsariévitchs Dimitri et Vassili, qui en voulaient a leur benjamin d'avoir su arracher la plume d'or, demandèrent à leur père sa bénédiction et partirent ensemble, A son tour, Ivan-tsariévitch se mit à prier le tsar de lui donner sa bénédiction. Mais le tsar lui répliqua en ces termes : « Mon cher fils, tu es encore bien jeune et bien peu aguerrit ! Qu'as-tu besoin de me quitter ? Tes frères sont déjà partis. Qu'adviendra-t-il si tu t'en vas et que, tous trois, vous ne revenez de longtemps ? Vois, je suis vieux et bien près de ma fin. Si, pendant votre absence, le Seigneur Dieu choisit de m'ôter la vie, qui donc me remplacera a la tète du royaume ? Une révolte peut éclater, l'ennemi attaquer, sait-on jamais, et qui, alors, prendra la tête des troupes ? » Mais le tsar eut beau prier, arguer, menacer, Ivan-tsariévitch resta inflexible. Le tsar lui donna alors sa bénédiction. Le vaillant gaillard se choisit un cheval et prit la route
Le chemin fut-il bref ou long, le temps passa-t-il vite ou non, conter c'est vite fait, agir c'est bien plus long, toujours est-il qu'il finit par déboucher dans la vaste plaine, sur la serte prairie. Là se dressait un poteau sur lequel ces mots étaient tracés : « Quiconque ira tout droit, souffrira la faim et le froid ; quiconque prendra a droite, restera en vie, mais son cheval sera tué ; quiconque prendra à gauche, sera tué, mais son cheval restera un vie.» Songeant qu'il pourrait toujours trouver un autre cheval, Ivan-tsariévitch prit à droite. Un jour passa, puis deux, puis trois, tout à coup, devant lui surgit un énorme loup gris, qui lui parla ainsi : « Bonjour à toi, jeune Ivan-tsariévitch ! Eh bien, tu as lu ce qui était écrit sur le poteau ?
Alors, tu sais que tu vas perdre ton cheval ? Pourquoi donc avoir choisi ce chemin ?" Et, se jetant sur le cheval, le loup le dévora, puis il disparut.
Ivan-tsariévitch pleura amèrement, puis il partit à pied. Il chemina un jour entier et, fatigué, voulut s'asseoir pour se reposer, lorsque, soudain, il lut rattrapé par le loup gris : " Cela me fait pitié lvan-tsariévitch, dit celui-ci, de te voir t'épuiser a faire ainsi la route à pied. Allez, monte sur mon dos et dis ou tu as besoin d'aller ! "
lvan-tsariévitch expliqua qu'il était à la recherche de l'oiselle de feu. Alors, le loup gris l'emporta sur son dos plus rapidement qu'un cheval et il le conduisit jusqu'à une muraille. Il faisait nuit. Le loup dit : « Descends et franchis ce mur ! De l'autre côté s'étend un jardin. Dans ce jardin tu verras l'oiselle de feu enfermée dans sa cage d'or. Prends l'oiselle, mais surtout, ne touche pas à la cage ! Sinon, tu ne ressortirais pas vivant du jardin ! » Ivan-tsariévitch franchit le mur, se retrouva dans le jardin et fut ébloui à la vue de l'oiselle de feu dans sa cage d'or. Déjà, il la sortait de sa cage quand il songea :
Prendre l'oiselle de feu sans la cage, et où la mettrai-je ? », et il tendit la main vers la cage. Il ne l'eut pas plutôt touchée qu'un vacarme assourdissant emplit le jardin : de cette cage, en effet, partaient de tous côtés des cordes tendues. Sur-le-champ, les gardes accoururent, s'emparèrent d'Ivan-tsariévitch qui n'avait pas lâché l'oiselle, et le menèrent dare-dare à leur tsar qui se nommait Dolmate. En proie au courroux, le tsar Dalmate se mit à crier :
« N'as-tu pas honte de voler ? Et d'abord, qui es-tu, de quel royaume, de quel père et quel est ton nom ? » Le jeune homme fit cette réponse : « Je suis le fils du tsar Vyslav et l'on m'appelle Ivan-tsariévitch. Nuit après nuit, ton oiselle de feu est venue dans notre jardin arracher des pommes d'or ; elle a presque entièrement détruit le jardin préféré de mon père. C'est pour cela qu'il m'a envoyé la chercher et la lui rapporter ! - Voyons, jeune lvan-tsariévitch, est il bien d'agir comme tu l'as fait ? Si tu étais venu me trouver, je t'aurais volontiers donné l'oiselle de feu. Veux-tu donc que je proclame par tous les pays, par tous les royaumes, que tu n'es qu'un misérable voleur ? Mais, écoute ! Rends-moi le service suivant et je te pardonnerai ta faute et te ferai don de l'oiselle de feu : va par-delà trois fois neuf pays, dans le trois fois dixième royaume, et obtiens du tsar Afrone le cheval à la crinière d'or ! Si tu n'y parviens pas, je ferai savoir par tous les pays, par tous les royaumes, que tu n'es qu'un misérable voleur ! "
Ivan-tsariévitch quitta le tsar Dolmate après lui avoir promis de lui ramener le cheval à la crinière d'or.

Grandement affligé il revint vers le loup gris à qui il conta tout ce qui s'était passé.
« Hélas, jeune Ivan-tsariévitch dit le loup gris, qu'as-tu été me désobéir et prendre la cage d'or ? - Pardonne-moi ! - Fort bien ! Allons, monte sur mon dos et je te conduirai où il faut ! »
A peine Ivan-tsariévitch fut-il monté sur son dos, que le loup gris s'élançait comme une flèche et, au bout d'un temps plus ou moins long, il parvint en pleine nuit dans l'État du tsar Afrone. Il s'arrêta devant l'écurie royale bâtie de pierre blanche et dit à son cavalier : « A cette heure-ci, tous les palefreniers dorment, tu peux donc entrer et t'emparer du cheval à la crinière d'or ! Mais prends garde : au mur est suspendue une bride en or. Surtout, n'y touche pas, sinon tu es perdu ! " Ivan-tsariévitch entra dans l'écurie royale, prit le cheval et il allait repartir lorsqu'il vit, accrochée au mur, la bride d'or. Elle lui plut tellement qu'il la décrocha. Dans l'instant, un vacarme assourdissant retentit alentour, car de cette bride partaient de tous côtés des cordes tendues. Les palefreniers furent aussitôt debout, ils se saisirent d'Ivan-tsarievitch et le conduisirent au tsar Afrone. Le tsar Afrone dit : « Eh bien, jeune homme ! Dis-moi de quel État tu es, de quel père, et quel est ton nom ? - Je suis le fils du tsar Vyslav et l'on m'appelle Ivan-tsariévitch ! - Et alors, jeune Ivan-tsariévitch, ce que tu viens de faire est-il digne d'un chevalier ? Si tu étais venu me voir, je ne t'aurais pas refusé le cheval à la crinière d'or. Veux-tu donc que je déclare à travers tous les pays que tu t'es conduit en malfaiteur ? Mais, écoute, Ivan-tsarïévitch ! Si tu me rends un service, si tu vas par-delà trois fois neuf pays, dans le trois fois dixième royaume, et que tu m'obtiens la reine Hélène la Belle que j'aime depuis longtemps mais que je n'ai pas réussi à épouser jusqu'ici, alors je te pardonnerai ta faute et te ferai cadeau du cheval à la crinière d'or avec la bride d'or. Mais si tu n'y parviens pas, je ferai savoir à travers tous les pays que tu t'es conduit en malfaiteur ! »