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Le Roman de Renard - Starewitch Suggérer par mail
 

Ecrit par Sechy, le 14-12-2008 01:07

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Publié dans : Présentation Dessins Animés, Dessins animés divers

Tags : Animation, Marionnettes, Le Roman de Renard, Ladislas Starewitch, Russie


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 Le Roman de Renard
 
 
(L’image couleurs ci-dessus représente le Renard et le Corbeau, manuscrit de la B.N. n° 1580)

Chef d’œuvre français du film d'animation de marionnettes, réalisé en 1929-1930 par Ladislas et Irène Starewitch et animé par eux. Musique de Vincent Scotto avec orchestre dirigé par Raymond Legrand, le père de Michel Legrand, dialogues de Jean Nohain, avec les voix de : Claude Dauphin (le Singe), Sylvia Bataille (le Lapin), Romain Bouquet (le Renard), Sylvain Itkine (le Loup). La Romance du Chat est chantée par Jaime Plana.
 
Ladislas Starewitch (1882 - 1965). À trois ou six mois près, j’aurai pu le rencontrer, mais c’était trop juste par rapport à ma période de rencontres des réalisateurs de dessins animés comme Michel Boschet (1), Paul Grimaul, Alexandre Alexeïeff (écran d’épingles), Étienne Raik (animation d’objets), etc.

Le Roman de Renard a hélas dut attendre 10 ans avant de paraître sur les écrans en 1941, le premier producteur ayant fait faillite. De plus il y a eu des piétinements à cause de l’invention du cinéma sonore (1929). Réalisé en noir et blanc et en 18 mois, y compris la fabrication des marionnettes, et dans des conditions difficiles (voir le DVD disponible sur le site de la Fnac par exemple, avec le commentaire de la petite fille de Starewitch), c’est véritablement extraordinaire. Starewitch travaillait très vite. Il a tourné avec deux caméras : une version pour la UFA allemande sonorisée dès 1936 avec voix off, et la version française resté en rade jusqu’à 1941.
 
 
Plus que le travail dans le dessin animé, où on dessine beaucoup, même aidé par l’outil informatique actuel ; le travail sur un film de marionnettes demande une grande habilité de ses mains : travailler le métal, le bois, les tissus, les cartons et un tas de petites matières pour les marionnettes (d’environ 20 cm de haut) et les décors, il faut écrire des histoires et avoir le sens de la comédie, et surtout être patient.
La notoriété de Starewitch est venue dès qu’il eu montré une courte bande de 10 mètres au tsar de Russie en 1910. Le cinéma était considéré à ses débuts comme un art de saltimbanques, si le film de Starewitch a été montré au tsar Nicolas II et à son fils, c’est qu’il comportait des marionnettes sous formes d’insectes, c’était donc considéré comme un documentaire et non comme un produit de divertissement. Des copies de cette courte bande furent distribuées partout dans le monde. L’entomologie passionnait Starewitch, et ses films avec des marionnettes insectes donnaient l’illusion de montrer des vrais insectes.
Un studio de marionnettes fut construit à Moscou avant la révolution bolchevik fomentée par les grands argentiers, qui hélas stoppa tout. Starewitch s’exila en France.
 
 
Maintenant voici le passage sur Starewitch du livre rare de Lo Ducca : Le Dessin Animé, Histoire Esthétique Technique, Introduction de Walt Disney, Prisma 1948. J’ai corrigé légèrement en fonction de ce qu’explique la petite fille de Starewitch dans le DVD du film.

Le sommet de cette technique de la marionnette animée fut atteint vingt ans après Cohl par le Roman de Renard de Ladislas Starewitch, de 85 minutes, sonore et parlant. Personne n’aura plus de patience que ce Lituanien qui travailla en banlieue de Paris pendant 18 mois pour réaliser la belle fable du Renard trop rusé. Les qualités du film étaient hors discussion : grâce, poésie, ironie, musique se succédaient pendant 85 minutes. Avec le recul des années, ce « truc » (de trucage) ingénieux a fini par nous donner une impression de fatigue : quand la nouveauté et le charme du spectacle s’estompèrent, on ne put éviter de songer que, par exemple, quand Noble le Lion est sur son trône, en discussion avec ses chefs militaires, les ressources du dessin animé auraient pu donner, à temps égal, un monceau d’événements mimiques et humoristiques sur tous les plans de la scène.
 
 
 
Ce n’est qu’une critique d’ordre générale ; honnêtement, on ne peut pas séparer le facteur divertissement des amusants Fantoches vivants de Pol Bianchi, ou La course du Lièvre et du Hérisson de Paul Diehl, tous les deux sur la voie tracée par Starewitch. Signalons encore les maquettes animées de Zoubovitch, d’un esprit excellent, Au clair de la lune (1943, décors de Dinks, poupées de Mlle Popardin, sérénade chantée par Grichine), et Le Briquet magique (1944) d’après Andersen.
L’œuvre de Starewitch demeure la plus importante de ce genre de cinéma. Il a été un précurseur (2), car l’idée de la marionnette animée lui suggéra, dès 1909, dans Les Cerfs-Volants (Moscou, Khanjonkoff), d’utiliser la reconstitution « artificielle » d’un mouvement. A l’origine, ma « marionnette » n’était qu’un scarabée en bois, soigneusement articulé ; puis Starewitch se servit de personnages moins scientifiques et plus légendaires. Depuis 1921, il a réalisé à Fontenay-sous-Bois une prodigieuse série de films :
- Les Griffes de l’Araignée (1920)
- Le Mariage de Babylas (1921)
- L’Épouvantail
- Les Grenouilles qui demandaient un Roi (d’après La Fontaine)
- La Voix du Rossignol (1925)
- La Petite Chanteuse des rues
- Les Yeux du Dragon (1925)
- Le Rat de ville et le Rat des champs (1926) (d’après La Fontaine)
- La Cigale et la Fourmi (1927) (d’après La Fontaine)
- Le Rêve des Papillons
- L’Horloge magique (1928)
- La Petite Parade (1930)
...
- Carrousel Boréal (1958) (semble être son dernier film)


 
 
 
Dès les premiers plans ce qui est extraordinaire ce sont les expressions de visage des animaux, grâce à l’animation de leurs yeux et de quelques parties de leurs visages, la fraîcheur des décors et des éclairages. Inoubliable la « Pêche à la Lune », les scènes sont pleines de vie. Mais c’est tout le film qui est plein de vie. La Pêche à la Lune consiste pour un Loup a plonger sa queue en pleine hiver dans un trou d’eau pour attraper plein de poissons. Vous imaginez ce qui va se passer au bout de quelques temps ! Ainsi toutes les victimes de Renard viennent-elles déposer leurs doléances auprès de Noble le Lion en son château. Il y a notamment le Corbeau venant réclamer son fromage... L’avocat Blaireau essaye de défendre Renard son cousin, le pauvre vit en son château avec sa femme et ses trois enfants.
Noble le Lion en a marre de toutes ces récriminations, il décrète qu’il sera désormais interdit de se manger les uns les autres. Voilà une excellente chose ! Ainsi seul les légumes, les laitages et les fruits sont autorisés ; et a daté de ce jour le plus grand amour doit régner sur la Terre. Ceux qui enfreindront cette règle seront pendus ; seul le Roi aura droit à un peu de chair fraîche le jeudi et le dimanche !
 
 
Ensuite vient la fameuse sérénade au clair de Lune de la Romance du Chat (3) à la guitare, qui est amoureux de la Reine Lionne. Vincent Scotto, dont j’aime beaucoup la musique, était un mélodiste né. On lui doit la célèbre Petite Tonkinoise chantée par Joséphine Baker (version d’origine sublime avec une diction irréprochable qui a disparue à notre époque). On a souvent reproché à Vincent Scotto qu’il n’était pas un compositeur, c’est inexacte, même s’il était aidé pour le travail d’orchestration. A ce compte là, il faudrait enlever le nom de compositeur de musique de beaucoup de musiciens de films américains notamment.
Après l’annonce du décret de Noble le Lion, vous pensez bien que Starewitch fait faire un petit ballet entraînant à beaucoup de ses animaux, au son de la musique de Scotto. Cependant dans le Roman de Renard de Starewitch, je ne suis pas convaincu par l’accord musique de Scotto et le sujet du film. Je sens un décalage, la musique de Scotto étant trop opérette, trop Folies Bergères pour le sujet. J’imagine ce que Arthur Honegger aurait pu composer pour ce chef d’œuvre, car Honegger était à mon humble avis plus doué pour la musique de film que Vincent Scotto. Honegger s’adaptait au sujet et à l’atmosphère du film pour lequel il composait ; Scotto a peut fait cela pour le Roman de Renard. Quelques moments musicaux vont plus ou moins bien avec le film, par exemple la Romance du Chat qui « fait vraiment Scotto », des phrases au début du film, peut-être le rythme trépidant dans la séquence de l’assaut final. Cela dit, l’ensemble musical possède un charme important.
 
 
Évidemment, être végétarien ne convient pas à Renard. Nous n’en sommes pas encore au passage de la Bible (Isaïe 65-25) où il est écrit que le Loup et l’Agnelet paîtront ensemble, et que le Lion et le Bœuf mangeront de la paille, et le Serpent se nourrira de poussière.
Cependant, Renard essaye de croquer des fleurs... infecte ! Il ne lui reste plus qu’a monter un énième piège pour nourrir son estomac... et sa petite famille.
Le Loup a droit à une scène surréaliste : au fond d’un puits il voit Renard au Paradis, ou celui-ci lui fait croire qu’il est dans un monde meilleur où tout est délicieux, enchanté, tout se transforme : le lait en vin, bref la jonglerie des atomes chère aux Alchimistes. C’est bien connu que sur Terre, on souffre, on travaille !
Le Paradis au fond d’un puits faut le faire ! Le loup saute dans un saut et par contre-poids...
 
 
Hélas un coq amène un cadavre à moitié dévore à Noble le Lion. Tous sont horrifiés, et les petits poussins réclament leur mère dont une grande partie est désormais dans l’estomac de Renard.
Ainsi Noble charge Capitaine Ours de ramener Renard de son château de Malpertuis. Aussitôt mis au courant de l’arrivée de Capitaine Ours par un de ses renardeaux, Renard organise ses ruses. Il n’a pas a chercher loin avec du miel ! Hélas hélas vous pouvez imaginer ce qu’il arrive au pauvre Ours. Aussi Noble envoie maintenant à Malpertuis le Chat. Renard connaît les faiblesses de ses congénères, comme avec le miel de Capitaine Ours il utilise des souris ! il l’envoie même aux Pays des Souris.
Devant ces échecs répétés Noble charge maintenant le Blaireau de ramener Renard. Celui-ci rêve : dans une séquence étonnante où se trouve un grand nombre de petites marionnettes va avoir lieu un combat entre Renard et le Loup, sous l’arbitrage de Capitaine Ours. Ragaillardit par son rêve, Renard se rend chez le Roi... pour y être pendu, haut et court, ça va sans dire ! et il sera pendu ici pour éviter d’aller se faire pendre ailleurs ! en lui souhaitant que l’Enfer lui soit accueillant... Au dernier moment... C’est au tour de Noble le Lion de se faire avoir.
 
 
Après ce coup là il monte le siège du château de Malpertuis. C’est une séquence drôle et extraordinaire de par la maîtrise de l’animation de multiples personnages et d’accessoires, des gags et astuces de mise en scène. Une des meilleures séquences du film. En plus Starewitch mélange des vues réelles comme l’eau, ce qui est délicat du point de vue technique, pareil pour des reflets, du feu, de la fumée qu’on ne peut bien-sûr animer image par image. Il utilise aussi la projection de décor sur un fond blanc translucide, avec un ajout de bout de décor sur lequel évolue sa marionnette, cela peut se deviner dans certains plans.
La morale finale est astucieuse, même plus que les astuces de Renard !

Ce bijou du cinéma marquera cet art pendant encore longtemps. La copie a été restaurée, mais il reste des rares sautes d’images, des rayures, quelques scintillements d’images.

Michel Roudakoff



Notes.
1. Sur Internet il n’y a presque rien sur ce réalisateur de dessins animés, qui avait fondé avec André Martin Les Films Martin Boschet, rue Ordener à Paris. Ce furent des réalisateurs importants du dessin animé français des années 1960 - 1970. http://fr.wikipedia.org/wiki/Michel_Boschet

2. Né à Moscou, Starewitch a fondé avec l’archéologue Dowguird, le Musée de Kaunas en Lituanie.
C’est ici qu’il songe a des films sur la vie des insectes ; les moyens de l’époque ne permettant pas de les filmer directement, il les remplace par des « poupées » et crée sa technique particulière du « tour de manivelle » (un tour égal l’avancée d’une image). C’est à cette époque qu’il réalisa :
- Lucanide
- Les Quatre Petites Grenouilles
- La Cigale et la Fourmi (distingué par le tsar Nicolas II) Pendant la période 1913-1919, il a été metteur en scène de films à grand spectacle.
 
3. Paroles de la Romance du Chat.
Tu sais bien que je t’aimes,
Miaou, miaou.
Mon cœur n’est pas bohème,
Miaou, miaou.
Puisque tu sais qu’il t’appartient,
Donne moi le tien.

Ce soir au Clair de Lune,
Miaou, miaou.
Dans l’ivresse commune,
Miaou, miaou.
Je veux le crier sur les toits,
Je n’aime que toi.

Chéri je viens ramer (?) vers ta demeure,
Ne me fait pas languir ouvre tes bras.
Chacun dans sa maison dort à cette heure ;
Et dans la rue il n’y a plus un chat.

Tu sais bien que je t’aimes,
Miaou, miaou.
Mon cœur n’est pas bohème,
Miaou, miaou.
Puisque tu sais qu’il t’appartient,
Donne moi le tien.

Ce soir au Clair de Lune,
Miaou, miaou.
Dans l’ivresse commune,
Miaou, miaou.
Je veux le crier sur les toits,
Je n’aime que toi.
 
 
 
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Dernière mise à jour : 14-12-2008 13:24

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