Cabinet des curiosités
 

Ecrit par Sechy, le 25-07-2010 21:55

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Publié dans : Les News, Dernières news

Tags : Argent, Banques, Cinéma, Conditionnement, Films, liberté, Loisirs, Politique


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Cabinet des curiosités
et société des loisirs


La nouvelle attraction foraine : le Cinématographe.
Le nouveau sage défouloir du peuple, et son contraire, le débridage
des instincts avec les parades et autres carnavals.
Que la fête commence ! et continue en cas de pépin...
 
 
Le cinéma actuel découle des arts forains du 19è siècle : un amusement, du A privatif : privation des muses ou de l’inspiration. Un amusement pour distraire des lourdes charges de l’esclavage toujours en place. On voit où cela nous a mené : un conditionnement de plus. Comme disait Roberto Rossellini : « En fin de compte, instinctivement, les gens se construisent la société comme ils veulent, comme ils la désirent ». Oui, mais il y a des meneurs, en clair ou en codé...
 
Le cinéma découle d’un entre-deux entre le cabinet des curiosités de la Renaissance et le cirque et autres arts forains, eux-mêmes issus des tréteaux du Moyen-Age. Il ne faut pas oublier que ce fut une découverte technique issue de la photographie quelques décennies avant. A son début il est passé d’un aspect presque documentaire et d’émerveillement par un déclin qu’il a fallut remonter par ce qu’on a appelé « le film d’art », ou film racontant une histoire écrite par un scénariste ou adapté d’un écrivain ou d’un romancier.

Le cinéma est surtout devenu une industrie de par ses  outils : diverses machines en allant de la fabrication de la pellicule, de son laboratoire de traitement, de la caméra de prise de vues, puis du projecteur et par la suite du dispositif de restitution sonore. Tout ça a explosé avec l’introduction du digital et de l’informatique issus de l’amélioration de l’électronique avec l’utilisation des transistors.

Comme le cinéma à ses débuts était « une curiosité », un émerveillement de voir bouger des images photographiques, ou dessiné dans le cas du dessin animé balbutiant, les opérateurs ou cameramen faisaient tout : ils développaient aussi leur pellicules après avoir filmé des heures durant des badauds à un carrefour ; et le soir les même badauds se précipitaient pour savoir s’ils « étaient sur l’écran », version ancienne du « Je passe à la télé » et autres Star Académie.
On équilibrait surtout à l’époque machines, pellicules, et maigrement sujet du film.
Bizarrement, dès 1898 le cinéma commence à s’essouffler, l’industrie des Frères Lumière fait de moins en moins de films pour ne se concentrer que sur ses machines. Les histoires sont reléguées au magicien Georges Méliès et c’est l’apparition d’un certaine mobilité de la caméra, et des trucages.

Aux États-unis, l’héritage de l’entertainment de Phineas Barnum donne aussi des arts forains : les hommes-troncs, les dompteurs, les musées de cire, les palais de l’électricité dans le style des cabinets des curiosités, les lutteurs, et tout ce petit monde qui s’étaient servis de films comme parade ou comme attraction pour attirer le client, transforment leurs baraques en cinémas. Ce mouvement débute pourtant en Angleterre, et éclata aux États-unis, en France, et dans toutes l’Europe.

Certaines baraques foraines abritaient plusieurs centaines de spectateurs, debout, ou assis, ou sur des bancs de velours rouge. Le phonographe à pavillon tenait lieu de bande sonore, et un bonimenteur commentait les films. Ces petites entreprises étaient artisanales et familiales.
Aux États-Unis se construisirent les Nickel Odeons, nickel indique la pièce de cinq cents pour l’entrée de la salle. Malgré le tarif d’entrée si réduit les bénéfices des salles furent considérables : les bénéfices hebdomadaires d’une salle suffisaient presque toujours à financer la construction et l’ouverture d’une nouvelle salle. Comme toujours depuis la nuit des temps, et même jusque dans les cirques de l’Empire Romain, ce fut le bas peuple qui assistait aux représentations, surtout des émigrants qui débarquaient alors à une cadence qui dépassa annuellement le million.

Mais il faut savoir que « Seul celui qui travaille avec ses mains établit avec les choses un contact que la raison ne connaît pas ». Aussi comme racontait Jean Renoir : « A partir du moment où on peut se permettre d’être un intellectuel, de cesser d’être un manuel, on tombe dans un danger très grand... ». Renoir savait ce qu’il disait, de par son père le peintre Auguste Renoir, et parce qu’il avait pratiqué la poterie, tout comme moi. Rares sont maintenant les films qui ne sont plus intellectuels, sauf chez les amateurs. Comme Jean Renoir aimait faire des films dans l'idée de la commedia dell'arte, la Règle du Jeu par exemple, les géniaux Laurel et Hardy sont pour moi un sommet de pureté et d'émerveillement en dehors de tout intellectualisme, surtout Laurel et Hardy au Far West. Ce tandem était et reste un modèle d'humanité.

En France, un ancien propriétaire de restaurant : Charles Pathé, fait transformer de nombreux théâtres et casinos en salles de cinéma, dans cette France encore fortement paysanne.
Aux États-Unis, avec l’arrivée des millions d’émigrants cherchant un eldorado, beaucoup de Juifs victimes de pogrom y débarquent. Parmi eux : Samuel Goldwyn.

Il est né dans la misère d’un ghetto à Varsovie, en 1882. orphelin à 10 ans il émigre. De misère en misère il se retrouve dans le New York du quartier juifs d’Europe orientale ; et là, de vendeur de gants de boxe en rachat de l’usine qui le fabrique, Samuel Goldwyn entre par hasard dans un saloon en 1913 où on annonce « Une fantastique séance de cinématographe ». Voyant Sarah Bernhardt sur le drap blanc qui servait d’écran il décide d’abandonner le boxe et les gants pour « faire du cinéma ». Avec ses économies : 15 000 dollars de l’époque, il engage pour 100 dollars un inconnu : Cecil Blount De Mille.
Leur premier film en 1914 : The Squaw Man (Le Mari de l’Indienne) remporte un triomphe et de l’argent dans la caisse.
Au lendemain de la première guerre mondiale, Samuel Goldwyn sans savoir pourquoi achète des champs d’orangers et une vieille écurie sur la rive du Pacifique dans une région de Los Angeles, dans une banlieue : Hollywood. Par la suite Goldwyn rencontra Louis B. Mayer, lui aussi un émigré des pogroms de la Sainte Russie.

Notez que dans le nom Goldwyn il y a Gold ! l’Or... Quant à Louis B. Mayer, qui paraît-il était petit et laid, souvent méchant, très avare et bien-sur n’ayant aucun goût (il pouvait s’acheter des gens qui en avaient), en s’associant avec son copain de religion Goldwyn ils formèrent la célèbre Métro Goldwyn Mayer en 1924. Et là commença le lavage de cerveau du monde : ces messieurs, mais ils ne furent bien-sûr pas les seuls, décidèrent de « donner du rêve à l’Amérique » et par la suite au monde. Certains ont écrit que ce fut le départ de notre « société de consommation ». Je suis tout à fait d’accord : bien mâchée, bien ficelée comme savent le faire les Américains avec leur génie de l’organisation (satanique !), toute prête a être avalée, comme un big mac, une heure et demie ou plus de « bonheur » ou d’hypnose dans une salle obscure, accompagné de cochonneries à grignoter pour devenir mieux obèse, tout en contemplant des courses de chars comme dans les cirques de l’ancienne Rome, ou voir de jolies filles à moitié nues se tortiller devant un décor.

A la mort de Louis B. Mayer en 1957, et avec la montée en puissance de la télévision, puis de sa mise en couleurs, on a annoncé et on a cru que Hollywood était mort. Il n’y a qu’à voir maintenant qu’il n’en est rien. Certes, je crois savoir que beaucoup de salles de cinéma ont fermé, comme en France, chanté d’ailleurs par Eddy Mitchell. L’usine de Los Angeles continu d’inonder et d’alimenter par des séries les chaines de télévision de presque tous les pays. Mais ces séries, à de rares exceptions ou dans la science-fiction, se ressemblent toutes dans le matérialisme : police, justice, mode du terrorisme et du sécuritaire et de la conspiration, vie de famille et relations amoureuses, etc.
C’est-à-dire qu’Hollywood est devenu une usine à décerveler par le bas. Comme le disait Roberto Rossellini, cette industrie du rêve en a fait un cauchemar : les êtres humains se contentent d’exister, de consommer, ils ne sont pas, ils ne sont pas nés à eux-mêmes. Et je pense que c’est ça que le monde de notre époque commence à percevoir. Tout cela est encore une conséquence de la Révolution de 1789 : la liberté et la télévision. Avec la télévision on croit avoir (du A privatif : privé de voir) une fantastique ouverture sur le monde, qui s’adresse à des dizaines de millions de spectateurs donc d’individus calés dans le fauteuil de leur salon de leur HLM ; le discours en est  individuel. Le cinéma de par la communion apparente seulement à cause de la salle, est plus un moyen d’influencer la psychologie de masse, le discours est plus communautaire.
Avec Internet on a un mix des deux : à la fois individuel et communautaire, et c’est ça qui est fantastique et qui fait peur à certains, comme Monsieur Jacques Seguela, celui qui fait de la réclame, et entre autres auteur de : « Le Net est la plus grande saloperie qu’aient jamais inventée les hommes, c'est dieu vivant, parce que le net permet à tous les hommes de communiquer avec les autres hommes. En quelques secondes le net peut détruire une réputation ».

Les Goldwyn et autres Mayer ne sont que des requins de la finance. On le voit dans le parcours de Goldwyn, le cinéma ou les gants de boxe, peut importe. Au mieux ces producteurs étaient des vrais gosses, comme le dit Jean Renoir, mais je dirais contrairement à Renoir, que ces gosses n’étaient pas naïfs, puisqu’ils se précipitaient sur tout ce qui pouvait rapporter un maximum d’argent. « Make money » comme aiment le clamer les Américains. On voit où cela nous a conduit...
Par contre ces producteurs sont des criminels manipulateurs de consciences, des satanistes en forme de démiurges qui fabriquent le monde selon leurs désirs vicieux. Et Jean Renoir l’a bien perçu puisqu’il dit en 1958 dans le journal France-Observateur : « J’ai l’impression que le cinéma, dans quelques pays qu’il soit, présente des produits qui sapent l’idéal sur lequel devrait reposer, disons, la religion de ces producteurs.
Par exemple, la production cinématographique, pour pouvoir continuer telle qu’elle est, a besoin d’une société bien organisée, bien défendue. Or on se précipite à l’heure actuelle vers la production de films qui sapent toutes les données classiques de la survivance de la société. Il me semble que l’intérêt des producteurs est de maintenir une certaine morale, les films immoraux ne marcheront plus... ». J’ajoute, c’est ce que Roberto Rossellini dénonce par : ersatz de sentiments humains déformés.
Ainsi ces producteurs et tout ce qui va avec sont des gens qui se détruisent eux-mêmes, ils continuent à faire leur business, et auraient besoin d’une société stable, mais jouent à détruire la société, comme le soulignait Renoir.

J’ajoute que la surenchère technique actuelle lancé par Avatar, avec le relief au cinéma et la mode de la 3D, qui existe dans son principe depuis « l’invention » de la photo, n’est que de la poudre aux yeux pour masquer une tragique santé.
On appelle ça de la surenchère, histoire de relancer la pompe à fric. Le climax, héritage d’Aristote, ne suffit plus, la poule aux œufs d’Or se meurt. Jean Renoir disait en 1958, que le puritanisme américain qui opposait une barrière aux passions américaines a permis la production d’un grand nombre de films à la qualité plus que correcte. C’est-à-dire qu’on tremblait quand la star Lillian Gish allait se faire violer. « Aujourd’hui, comment veux-tu qu’on viole une jeune fille, qui a déjà fait l’amour avec toute la ville, avec le valet de chambre, papa, maman et la bonne ? Ça n’a plus aucun intérêt, elle peut être violée, on s’en fout », explique Renoir.

Pour le monde d’Hollywood le cinéma est une religion : celle de la caméra, à film ou digitale maintenant. « On a une caméra qui est planté sur un trépied, sur une grue, et qui est exactement comme l’autel du dieu Baal : autour d’elle, les grands prêtres qui sont les metteurs en scène, les cameramen, les assistants. Ils amènent, ces grands prêtres, des enfants à cette caméra, en holocauste, et les jettent dans le brasier. Et la caméra est là, immobile ou presque, et quand elle bouge, c’est suivant les données déterminées par les grands prêtres, et non par les victimes », racontait Jean Renoir.

M. R.
 
[Cette page est dédiée aux victimes de l'incendie du Bazar de la Charité. Terrible drame qui faillit mettre un terme à cette nouvelle attraction foraine : le cinématographe]
 
 

Dernière mise à jour : 26-07-2010 02:34

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