Le mental, les idées, bouclent sur elles-mêmes grâce aux concepts issus eux-mêmes du mental !
L’écriture n’est pas une transcription de la parole, mais elle est pour celle-ci devenu un modèle.
Ainsi l’écriture permis que certains aspects de la langue orale accèdent à la conscience (selon David R. Olson, L’univers de l’écrit)
Les premiers systèmes d’écriture remonte aux Anciens Égyptiens avec les Hiéroglyphes, aux Chinois, en Mésopotamie, en Amérique centrale avec les peuples du Soleil. Mais peut-être existait-il d’autres formes de signaux à l’époque et avant la chute de l’Atlantide, les variations infinies des couleurs par exemple... Un Hiéroglyphe ou un alphabet ne renvoie aucune couleur... Et avant tout il s’agit de VIBRATIONS.
La syntaxe fut inventée pour exprimer des propositions et combiner des signes à la façon dont s’harmonise une palette de couleurs. C’est le premier type d’écrit que de reproduire, non le contenu référentiel d’un énoncé, mais la forme verbale. On pouvait grâce à eux « dire la même chose » (
conventions) . On doit à ces systèmes d’avoir fait émerger des mots/maux. Ces écritures représentant des propositions, ils ont été les premiers à pouvoir représenter des formules négatives :
« Tu ne tueras point ».
La syntaxe et l’écriture ont conduit à la logique et à la formation de grammaire et de résumé et de classification pour amener l’encyclopédie et autres dictionnaires. Cela ne veut pas dire que la langue orale ne disposait pas de syntaxe ni de grammaire. Cela veut dire qu’une logique et une grammaire sont construit d’après des catégories issues du mental à partir de l’écrit (selon David R. Olson).
Rien ne permet de penser que nos façons de comprendre sont culturellement universelles, évidemment puisque c’est simplement issues du mental. Ainsi la culture n’est que de l’opinion en forme de
général et n’a donc rien à voir avec l’Universel.
Alors aucun système d’écriture, pas plus que d’alphabet terrestre ou extraterrestre comme nous le concevons d’une façon naïve et anthropomorphique, n’est capable de restituer tous les aspects de ce qui a été dit ou émis comme signaux. Les emblèmes, logos, totems, ne permettent pas de prendre conscience des mots. Phrases et syntaxe ne peuvent pas complètement représenter la forme verbale d’une expression. Elles ne peuvent pas retransmettre ce que l’on veut réellement dire en parlant. Ce qui est perdu par l’écrit, c’est qu’il est difficile de retrouver l’intention en lisant. Olson cite en exemple
Empédocle et « la mer salée est la sueur de la terre ». Parle-t-il littéralement ou métaphoriquement ? Heureusement qu’Olson ne se penche pas sur des ouvrages d’Alchimie !
Dans les livres d’Alchimistes, beaucoup de mots/maux sont des gouffres sans fond si on ne s’accroche pas à quelques rares clefs universels que les Adeptes daignent nous offrir. Et qui dit gouffre dit obscurité ! Les premiers prosateurs et historiens grecs sont impuissants à faire prendre conscience des syllabes, et les systèmes syllabiques des phonèmes.
Rappel : notre civilisation de l’écrit, donc bourrée de codes et de lois à n’en plus finir, et donc restreignant de plus en plus les libertés d’aller et venir de penser et de manger, est devenu un
Monde-Papier.
David R. Olson donne un exemple dans la préface de son livre :
L’univers de l’écrit :
Deux civilisations différentes partent à la recherche du garde-manger
dont l’emplacement est indiqué sur une carte. Après plusieurs heures de recherches sans résultat, la civilisation de l’écrit ne parvient pas à situer ce garde-manger sur la carte et des gens s'exclamèrent :
« Nous sommes perdus ! » Pour la civilisation de la langue
parlée, elle n’était absolument pas perdu, par contre, l’emplacement du
garde-manger était perdu !
La civilisation de l’écrit se plaçait tout entière sur la carte, se
coupant ainsi de la Nature ! ce que ne faisait pas la civilisation de
langue orale.
Conclusion : littérature, culture, science, philosophie,
codes et lois, système religieux sont des artefacts qui désormais
procèdent de l’écrit, et cette civilisation se bombardera de
« civilisée ». C’est grâce à ces artefacts que nous parvenons à nous
représenter nous-même, et que nous représentons nos idées et l’ensemble
du monde qui nous entoure :
OPINION. Les Alchimistes ayants compris cela
depuis de nombreux millénaires ont ainsi entrepris de découvrir la
Matière par eux-mêmes, au sein d’une musique de symboles composée de
thèmes et de variations sans cesse en mouvement.
Hermétisme et lecture à quantité de niveaux
Un texte hermétique d’un auteur Alchimiste ne pourra pas, ou très peu, être accessible à une première lecture, il faudra y revenir par de nombreuses lectures ; c’est en cela que l’Alchimie s’apparente à de la musique où l’interprétation ne sera jamais la même ; sauf si on la fixe en l’enregistrant dans un disque, qui restituera à la demande un son qu’on pourra alors interpréter selon son ouverture d’esprit du moment...
Ainsi chacun a son modèle de langage et estime qu’il est complet et capable de restituer tout ce qui a été dit ou écrit. Olson écrit que de nombreux anthropologues ont eut des difficultés, dans des cultures orales, pour convaincre leurs informateurs qu’ils devraient utiliser les « mêmes mots » à chaque fois qu’ils racontaient la même histoire.
En résumé : si un lecteur ou auditeur n’est pas réceptif, il passera à côté de ce que voulait exprimer le langage. Les écrits alphabétique représentent la forme verbale, ce qui a été dit, mais pas l’attitude du narrateur vis-à-vis de cette forme verbale, pas ce qu’il voulait dire.
Dans l’opinion que transmet un texte représentant un modèle, il est difficile de s’en détacher et d’imaginer comment celui qui ne partage pas cette opinion peut percevoir le langage. « Ceux qui pratiquent un alphabet trouve étonnant que quelqu’un d’autre ne réussisse pas à entendre les constituants « alphabétiques » de leur discours ; pour eux, ces constituants sont évidents », écrit Olson.
Notre modèle d’écriture n’est qu’un modèle parmi d’autres possibilités comme par exemple la télépathie. Avec la langue écrite et le dogme de l’opinion, on prend le
général pour l’Universel : car le modèle de l’écrit finit par être considéré comme des faits objectifs, qu’il s’agisse des mots/maux, des syllabes, du son des lettres ou du sens littéral. Ainsi une fois cette fausse construction établit, on a tendance à penser que ces structures qualifiés d’universelles existent dans le texte, comme par exemple la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, et que ceux qui ne parviennent pas à les y voir ou à les accepter sont atteints d’une cécité ou de dangerosité pour un pouvoir.
Bizarrement dans les écoles du killer Jules Ferry et d’ailleurs, on apprend à lire à partir de l'écrit en formant des sons, alors qu’on devrait faire l’inverse : l’écolier apprend à associer les sons et les lettres afin de rentrer dans un moule. Il paraît que le débat sur cet apprentissage de la lecture ne cesse de rebondir, car il concerne autant l’attitude à avoir avec les enfants que la recherche d’une pédagogie efficace. Alors, faut-il apprendre à parler avant d’apprendre à lire ou l’inverse ? Car apprendre à bien lire et à bien orthographier exige que l’on comprenne que le modèle graphique est un modèle de la parole.
Le plus grave, c’est que les enseignants et donc le pouvoir politique, et hier le franc-maçon Jules Ferry, se trompent lorsqu’ils considèrent l’apprentissage de la lecture comme une simple habilité nécessaire dans le monde esclavagiste du salarié, qui nécessite un entraînement, et non comme une prouesse intellectuelle (visualiser un ensemble de symboles pour aboutir à un concept ou représentation). Là encore la conception de l'éducation actuelle n'est que matérialiste et ne s'occupe pas de l'être en tant qu'être.
Sens caché ou interprétation
Exemple donné par David R. Olson : « Le dîner est à huit heures ». s’agit-il d’une promesse, d’une prévision, d’une invitation, d’une observation, huit heures est-il précis ou est-ce approximatif. Pour des précisions il faudra se fier au son émis sur cette phrase. Cela sera encore plus imprécis quand la phrase sera écrite. On a la même chose ces déclarations de style scolaire : « Une herbe est verte », ou « J’affirme qu’une herbe est vert », qui sont encore des opinions indépendamment de leur représentation littérale ou précise ou métaphorique.
Pour David R. Olson l’écriture aide comme une « conscience-papier » renforçant la conscience.
Mais il ne faut jamais s’enfermer dans un système, ainsi : « Ce qui apparu comme une technique efficace [écriture] chez Saint Thomas d’Aquin, est devenu un article de foi pour les
réformateurs. Pour Saint Thomas d’Aquin, le sens littéral d’une écriture n’est jamais que la première étape de l’interprétation ; pour
Luther toute l’interprétation s’y résume », écrit Olson.
C’est-à-dire que ces réformateurs ne juraient que par le texte, ils étaient « revenus au texte », qui fut ainsi transformé en quelque chose d’universel !
Intermédiaire entre langue orale et langue écrite.
La Langue des Oiseaux utilisé en Alchimie et sur des textes hermétiques est la seule transcription musicale issue du langage parlé, elle est euphonique (beau son comme celui des quelques oiseaux) en forme de cryptographie. Attention : la Langue des Oiseaux n’est pas un jeu d’esprit ! d’où son côté casse-gueule...La Langue des Oiseaux cherche à échapper à l’opinion courante...
« Ho, ho, ous n’estes pas le Roy Minos, ous estes le Roy Priant.
O donc je voyagisme sur l’or riant et sur la mardy Terre Année » (Cyrano de Bergerac, Le pédant joué, début de l’acte 2. C’est une comédie exceptionnelle et d’avant-garde)
Comme le dit
Ramana Maharshi et d’autres mystiques et chercheurs, le Silence est le seul langage universel, car il est le plus parfait. Mais il ne convient qu’aux chercheurs les plus avancés. Les autres sont incapables d’en tirer une inspiration, c’est pourquoi ils ont besoin de mots/maux pour expliquer une vérité. Comme l’explique Jean Coulonval dans son livre
Synthèse et Temps Nouveaux, la Vérité n’a pas besoin de mots/maux, elle n’admet aucune explication, car c’est déjà y introduire le temps ou chronologie nécessaire à la formation des idées. La Vérité ne peut être que « soufflée ». (Voir l’enseignement 569 du 7 novembre 1938). Toute analyse introduira une chronologie tueuse qui en effacera l’intention de départ.
Ainsi une analyse, une théorie, seront DANS la fugacité, la volatilité du monde des accidents ou monde spatio-temporel telles ces expressions et tentatives de réponses :
- Qu’est-ce que la croyance ?
- C’est l’état dans lequel se trouve celui qui affirme sincèrement quelque chose (selon Olson). Comme écrivait
Louis Cattiaux : « Les opérations Divines sont instantanées et soumises à la Foi », la vraie foi étant la réalisation du Soi divin.
- Que sont les intentions ?
- Ce sont les états dans lesquels nous nous trouvons lorsque nous promettons sincèrement de faire quelque chose. (Là encore on reste dans l’opinion ou hors de l’Instant ou Soi)
- Que sont les désirs ?
- C’est l’état dans lequel nous sommes lorsque nous formulons secrètement une requête.
Tout cela est de l’ordre du MENTAL, de l’OPINION, la « chose qui pense » façon Descartes.
Carl Gustav Jung écrivait dans sa biographie : Les hommes s’imaginent n’être rien de plus que ce qu’ils savent d’eux-mêmes. Or c’est un savoir borné, rationalisme et doctrinalisme (quantité) sont maladies, car ils prétendent répondre à tout. Pourtant nos notions de temps et d’espace ne sont qu’approximatives. Elles laissent ouvert un champ de variations relatives ou absolues.
Ou encore Empédocle :
L’élan de la Foi qui touche les cœurs est ardu pour les mortels et méprisé par eux.
L’écrivain
Savinien Cyrano de Bergerac, véritable génie en avance sur son époque, inventait un « transcripteur » de langage : « A l’ouverture de la boëste, je trouvé dedans un je ne sçay quoy de metal, casi tout semblable à nos horloges, plein d’un nombre infiny de petits ressorts et de machines imperceptibles ; c’est un Livre de la vérité, mais c’est un Livre miraculeux qui n’a ny fueillets ny caracteres ; enfin, c’est un Livre où pour apprendre les yeux sont inutiles ; on a besoin que d’oreilles. Quand quelqu’un donc souhaite lire, il bande avec une grande quantité de touttes sortes de clefs cette machine, puis il tourne l’esguille sur le chapitre qu’il desire escouter, et au mesme temps il sort de cette noix, comme de la bouche d’un homme ou d’un instrument de musicque, tous les sons distincts et differens qui servent entre les grands lunaires à l’expression du langage. (
L’Autre monde - La Lune, page 414).
Cyrano de Bergerac qui annonçait prophétiquement dans
L’Autre monde, ou bien possédait-il une Stargate ? les
enzymes et les microbes : « Représentés vous donc l’Univers comme un grand animal, les Estoilles qui sont des mondes comme d’autres animaux dedans luy qui servent reciprocquement de mondes à d’autres peuples, tels qu’à nous, qu’aux chevaux et qu’aux elephans, et nous, à nostre tour, sommes aussy des mondes de certaines gens encore plus petits comme des chancres, des poux, des vers, des cirons ; ceux cy sont la terre d’autres imperceptibles. Ainsy de mesme que nous paroissons un grand monde à ce petit peuple, peut-estre que nostre chair, nostre sang et nos esprits ne sont autre chose qu’une tissure de petits animaux qui s’entretienent, nous prestent mouvement par le leur, et se laissant aveuglement conduire à nostre volonté qui leur sert de cocher, nous conduisent nous mesme et produisent tout ensemble cette action que nous appelons la vie ».
Umberto Eco est un spécialiste du langage écrit, voir par exemple le film
Au nom de la Rose.
De même que l’affirmation ou l’observation de « Une herbe est verte », Umberto s’interroge sur la description, la définition, le sens d’un objet ordinaire, comme l’herbe : « Comment je reconnais un chat tous les jours ? Et comment je reconnais mon chat, ou ma femme sans les confondre avec les autres ? Voilà un problème très très ancien dans l’histoire de la philosophie ».
Ainsi, comme exprimé sur la page Un monde de conventions et comme le dit Umberto Eco, nous faisons « un contrat » sur la notion de pluie par exemple. Mais nous avons toujours peur de reconnaître que TOUT EST
CONVENTIONS. Alors la vérité se transforme en
OPINION, mais fondé sur quoi ? Sur des essences pour employer le mot de Jean Coulonval, sur des « raisons sérieuses » pour employer les mots d’Umberto Eco, lequel dit comme Coulonval que personnes n’établit des contrats ou des conventions sur rien. Eco s’écarte de Coulonval en nommant cette base : sens commun, en citant l’exemple de la pluie, où tout le monde est obligé de reconnaître « qu’elle mouille » mais ne brûle pas... Si on part du général qu’on transforme en universel, comme le système de
Ptolémée qui « a marché » pendant des siècles pour expliquer les équinoxes, on entre dans la tête de Ptolémée et de son opinion... comme nous sommes entré dans la tête des philosophes du siècle des lumières et d’Aristote et autres ergoteurs gréco-latins.
Umberto Eco explique qu’un groupe de gens pourraient se réunir dans une île déserte avec pour système de référence l’opinion de Ptolémée, ça marcherait aussi bien !
Alors dramatiquement on peut s’accorder, vivre sur une convention, une opinion, quand on sait pertinemment qu’elle est fausse. C’est comme ça que Satan mène le monde. Umberto Eco cite l’exemple : « Nous pouvons, ma femme et moi, décider que nous nous trompons l’un et l’autre, à condition de faire semblant de ne pas nous en apercevoir. C’est donc une CONVENTION... qui ne nie pas le fait que je trompe ma femme ».
Selon Eco chacun ayant sa vérité, son opinion, toutes les vérités sont équivalentes, et certaines vérités sont plus vraies que d’autres. Par exemple, comment être sûr que les Américains sont allés sur la Lune ? Les Russes ne l’ont pas démenti ! Ils étaient les seuls à avoir des services secrets suffisamment performants pour protester si c’était faux, explique Eco.
Eco explique aussi le phénomène de l’Internet et de son interactivité, sorte de gigantesque création collective et donc la fin de l’auteur et de ses droits, héritage de 1789 et de la bourgeoisie du 19ème siècle et de la montée en puissance des banquiers dans tous les sens. Mais rien de nouveau à notre époque car jouer tous les soirs une œuvre de Beethoven ce sera toujours une recréation chaque soir. Par contre Eco parle de la base d’une histoire, comme
Guerre et paix de
Tolstoï, si chacun s’amuse à décider que le prince Andreï ne meurt pas, que Natacha l’épouse... c’est intéressant, mais la force de ce roman est justement qu’il meurt, alors il n’y a plus à reconnaître que « c’est la vie ». Il y a nécessité et liberté, deux choses différentes, ou un thème et ses variations comme en Alchimie.
(Interview d’Umberto Eco, référence à
Télérama n° 2576 du 26 mai 1999).
Pourquoi ne se sert-on pas de vers luisants pour nous éclairer ?
M. R.