En cherchant son père
(Clic sur l’image pour voir le dessin animé)
EN CHERCHANT SON PÈRE - film illustrant un court passage du livre d'Ivan TOURGUENIEV : Premier Amour, dans la nouvelle "Un Rêve", chapitre 3.
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Un de mes songes, surtout, me troublait plus que les autres. Je
marchais le long d'une ruelle étroite et mal pavée, encadrée de maisons
vétustes, à toits pointus. J'étais à la recherche de mon père, qui
n'était pas mort et se cachait dans une de ces étranges bâtisses. Je
pénétrais sous un porche bas et sombre, traversais une courette
encombrée de planches et de bûches et entrais enfin dans une sorte de
mansarde, chichement éclairée par deux lucarnes rondes. Mon père se
tenait debout au milieu de la pièce, vêtu d'une robe de chambre, et
fumait la pipe. Mais il ne ressemblait nullement à mon vrai père : il
était grand, maigre, brun, avec un nez aquilin, des yeux sombres et
perçants, âgé de quelque quarante ans. Il m'en voulait de l'avoir
retrouvé, et moi, de mon côté, je n'étais nullement heureux de la
rencontre : je n'éprouvais qu'un sentiment de surprise, voire de
stupéfaction. L'homme se détournait de moi et commençait à grommeler
quelque chose, en arpentant la pièce à pas menus... Ensuite, il
s'éloignait petit à petit, sans s'arrêter de grommeler et en jetant des
regards en arrière, par-dessus l'épaule... Les murs de la pièce
s'écartaient et se fondaient dans un brouillard... Effrayé à l'idée de
perdre mon père encore une fois, je courais derrière lui, mais ne le
voyais plus, bien que j'entendisse toujours son ronchonnement irrité,
un ronchonnement grognon... Mon cœur se serrait, je me réveillais et
n'arrivais pas à me rendormir... Tout le jour suivant, je pensais à ce
rêve et ne lui trouvais évidemment pas d'explication satisfaisante.
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Un Rêve Version Originale
Ce film d'animation utilise la technique des estampes japonaises au
lavis à l'encre de Chine sur calque, éclairé par transparence. Les
dessins, exécutés très librement au pinceau, renvoient une animation
sous un état un peu déprimé ; peut-être reflète-t-elle l'atmosphère
oppressante du Rêve de la nouvelle de Tourgueniev. Je n'étais pas au
mieux à cette époque, au sortir des Arts Appliqués et à l'entrée à l'IDHEC (actuelle FEMIS).
Des bouts d'essais ont été filmé sous le rudimentaire banc-titre en
bois que j'avais construit dans le petit deux pièces où je vivais avec
mes parents. Ce banc-titre à pu être déménagé dans le petit logement à
côté de celui de mes parents, et grâce à la caméra à pompe de Berthold
Bartosch, j'ai tourné de courtes scènes. Berthold Bartosch, le
réalisateur du film L'IDÉE , m'avait vendu son matériel de prise de vues pour une modeste somme. La caméra Parvo
, du constructeur André Debrie, était actionné image par image par une
pompe, réplique en plus grand et en cuivre et en laiton d'une pompe à
vélo des années 1930. Cette pompe avait fière allure et cela faisait
bizarre de tirer sur " la chaîne " (comme sur une ancienne chasse-d'eau
de w.c.), afin de faire la prise de vue d'un dessin. Le temps
d'exposition de la pellicule de 35 mm, pouvait se régler en ouvrant
plus ou moins le débit de l'air dans le corps de la pompe fabriqué avec
précision. Bartosch a utilisé de la mousse de savon pour son film
L'IDÉE, afin de rendre l'épaisseur de l'air. Il était fasciné par le
savon et son utilisation sur des plaques de verre éclairées sur la
tranche par de petites ampoules électriques de faible puissance, d'où
un temps d'exposition multiple de la pellicule. (Bartosch faisait
jusqu'à 18 expositions pour une seule image). Je me souviens encore
avec émotion de mon entretien avec lui, dans son logement étroit
au-dessus du théâtre parisien du Vieux Colombier ; il me parlait aussi du compositeur Arthur Honegger
et lorsqu'il composait, de sa crainte des moindres bruits provenant de
son appartement de la rue de Clichy à Paris. Bartosch avait un côté
mystique, et l'animation de film était pour lui comme une religion qui
ne souffrait pas de compromis. Une religion parce que Bartosch payait
très cher pour son culte (les nazis ont détruit les 900 mètres de
négatif de son deuxième film, d'après l'hommage d' Alexandre Alexeïeff dans la Revue du cinéma Image et Son, numéro 224, de janvier 1969).
Je suis le dernier gardien de la pompe de Bartosch, qui à servit à faire des prises de vues sur le film " L'IDÉE ".
Finalement, " En cherchant son père " a été tourné à la sauvette sur le
banc-titre du constructeur Giraud dans une unité de l'ORTF, tard dans
la nuit pour ne pas déranger le service normal. Merci à Jean-Pierre
Girard, le producteur de la Société des Films Orzeaux, pour avoir
produit ce dessin animé en finalisant la fabrication par un
enregistrement en bonne et dû forme au CNC, pour le passage au studio
son pour l'enregistrement du morceau de ma musique où je jouais de la
balalaïka, et pour les finitions du montage et du tirage d'une copie
aux laboratoires LTC à Saint Cloud. En juin 2006, j'orchestre la
musique de " En cherchant son père ".
Merci aussi à Dominique Benicheti pour m'avoir entraîné et aidé à finir
ce film. Merci également à Philippe Delpont pour son aide.
M. Roudakoff
Dernière mise à jour : 13-11-2021 07:17
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