Je répondrais à la question ci-dessus dans le titre que c’était déjà le délire de ceux qui voulaient un Empire mondial ou Nouvel Ordre Mondial aujourd’hui ; le délire de posséder « un royaume universel » réunissant sous la direction d’un seul ou d’un petit groupe tous les peuples de la planète. Mais aujourd’hui c’est plus complexe, car il s’y mêle un ensemble d’égrégores beaucoup plus puissants qu’il y a 700 ans (chronologie récentiste), et indéniablement renforcé par la technologie actuelle.
D’abord le judaïsme et le christianisme REPOSENT SUR LES PAÏENS. Un
Grégoire de Nysse éprouva la même réalisation du Soi-Instant que Plotin (photo en haut de page), et il devait reprendre la description du Soi-Instant, ainsi on peut dire que le mysticisme chrétien a jailli d’une source païenne, celle de Plotin en partie.
Grégoire de Nysse voit Dieu comme extérieure : là où Plotin dit : « Son travail est de devenir ce qu’il a été une fois » [son état naturel], Grégoire de Nysse apporte un changement typiquement chrétien : il affirme que le retour n’est pas « notre travail », mais celui de Dieu. La différence avec Plotin est de taille ! En ce sens que Grégoire parle de SOUMISSION.
Qu’est-ce que le Soi ou Instant ?
Selon
Porphyre, élève de Plotin : « Plotin s’éleva jusqu’au Dieu premier et transcendant par la méditation indiquée par Platon dans
le Banquet ». Porphyre aurait aussi atteint l’Union mystique ou réalisation du Soi-Instant, mais une seule fois.
Plotin explique ainsi le Soi ou Instant : « Me détachant du corps, je m’éveille à mon vrai moi, me rends étranger au reste et me deviens intérieur à moi-même, et où contemplant une beauté merveilleuse, je me persuade alors que je fais partie d’une classe d’êtres supérieurs, et où j’ai activement joui de la forme de vie la plus noble, je me suis fondu avec le divin et fermement établi en lui » (Plot. IV 8 (6), 1.1-5).
Plotin pratique une union mystique avec son mental : une discipline de négation : nier l’opacité corporelle du monde, enlever de votre mental le cadre-spatio-temporel de référence, et chasser le réseau des relations ou dualité » (chasser l'opinion). C’est ainsi que l’on arrive, presque, au Vide : « un centre de conscience qui est en puissance, mais pas encore en fait, l’Absolu ».
Bref, Plotin aboutit à l’absence de dualité sujet-objet : « L’âme voit Dieu subitement apparaître en elle, car il n’y a plus rien entre elle et Lui ; ils ne sont plus deux, mais les deux ne font qu’un, plus de distinction possible tant qu’il est là… L’âme n’est plus consciente d’être dans un corps, elle n’a plus conscience d’elle-même ni de son identité : homme ou être vivant, chose ou totalité des choses… car cet état est le Bien, et il n’y a rien de meilleur ».
Un description du retour sur soi-même et le vide en soi-même pour se remplir de l’Instant, la Vraie Paix, ce qui est la Réalisation du Soi-Instant, décrite sans cesse, depuis l’Inde antique jusqu’à celle de
Ramana Maharshi, et même jusqu’à l’Amérique « moderne ». La réalisation du Soi-Instant est universelle et éternelle.
Pour cette Réalisation du Soi, Plotin ne recommande aucun exercice de respiration, ni de contemplation quelconque, ni la répétition de syllabes sacrées, et il n’exige aucun rituel pour provoquer l’expérience. Ramana Maharshi dit bien que la Réalisation du Soi-Instant est NOTRE ÉTAT NATUREL : « Le Soi n’a pas à être atteint. Y a-t-il un seul Instant où le Soi n’existe pas ? Il n’est pas nouveau. Soyez ce que vous êtes. Ce qui est nouveau ne peut pas être permanent. Ce qui est Réel doit exister toujours » (entretien 41).
Plotin utilise la rationalité à la Platon ou à la Grecque pour parvenir au Soi. C’était son problème ! Pour Plotin comme pour son maitre Platon, l’entraînement du contemplatif commence avec les mathématiques et se prolonge dans la dialectique (Plotin connaissait la géométrie, la théorie des nombres, la mécanique, l’optique, la musique).
Plotin dit aussi que « celui qui veut faire l’expérience mystique doit être un orfèvre en morale : enlever tout ce qui dépasse et rectifier tous les défauts ».
Plotin est très proche de Ramana Maharshi, car pour lui l’Union mystique est un événement NATUREL, et non une grâce surnaturelle, comme dans la théorie chrétienne ou musulmane. Le Soi est la racine naturelle sur laquelle repose le soi ou ‘je’ avec le j minuscule (l'ego). Le Soi ou Instant est avénement de quelque chose qui attendait le moment de sa réalisation, le dévoilement de l’instantané d’une donné éternelle.
« L’Un, dit Plotin, parce qu’il ne contient aucune altérité, est toujours présent ; mais nous, nous ne sommes présents que lorsque nous nous débarrassons de l’altérité ». il ajoute : « L’Un n’éprouve aucun désir à notre endroit pour faire de nous son centre, au contraire de nous, nous avons du désir pour lui pour en faire notre centre. En fait, c’est lui qui est perpétuellement notre Centre, mais nous ne fixons pas toujours nos yeux sur ce Centre [
Centrum Centri] » (Plot. VI 9(9), 8. 33-38).
IMPORTANT : L’un ne peut pas désirer, car le désir appartient à la dualité sujet-objet, ou l’effet ne peut pas influencer sa cause…
Centrum Centrum ou Soi-Instant peut aussi porter le nom d’AMOUR ou EROS (sens de
amor sui). Le divin ou la grâce est permanente.
AMOUR : du A privatif et Mur ou Mort : privé de mort, soit faire naître le permanent, faire naître une « descendance ».
« Je suis égal [le Soi-Instant] en toutes les existences, nul ne M’est cher, nul par Moi n’est haï ; cependant ceux qui se tournent vers Moi avec amour et dévotion ils sont en Moi et je suis aussi en eux ». (
Bhagavad-Gîtâ, chapitre 9, 29)
RAPPEL du principal piège de l’ego : Dans le mental, si on s’attarde sur le vide de la vacuité, c’est que cette vacuité n’est pas encore vide. « Un esprit vide qui ne pense pas à sa vacuité, voilà ce qu’on appelle la Véritable Vacuité » (précepte taoïste dans
Le Secret de la Fleur d’Or).
Aujourd’hui le sens du mot « philosophie » est déformé (surtout par un BHL !!!). L’
Asclépius hermétique dit : « La philosophie consiste dans le seul désir de mieux connaître la divinité par une contemplation habituelle et une piété dévote » (
Asclépius 12, Corp. Herm. II,
Festugière).
Philosophie : de
Philo (élève) et
Sophie (le Sage), donc l’élève de la Science (Connaissance/Savoir universel).
Maxime de Tyr dit (XI, 10b, 11e) : « Dévêts-toi de tout habillement, arrête par la pensée la préoccupation des yeux, et dans ce qui reste, tu verras l’objet de ton désir ». Ou : « Arrête l’activité des sens du corps, et alors se produira la naissance de la divinité ».
Numénius, qui était lu à l’école de Plotin, compare le contemplatif à un veilleur sur un sommet, qui regarde la mer vide et qui tout à coup aperçoit une barque au loin : « Il faut s’éloigner des choses des sens [monde spatio-temporel] et entrer en une communion, seul à seul, avec le Bien, là où il n’y a ni être humain, ni aucune autre créature, ni corps grand ou petit, mais seulement une sorte de « désolation divine » qui, à vrai dire, ne peut être ni exprimée ni décrite ; là où se trouvent les retraites, les demeures et les splendeurs du Bien et où le Bien lui-même est un repos dans la paix et la bienveillance, le Principe souverain voguant sereinement sur les flots de l’Être ».
Numénius affirmait « l’identité sans possibilité de distinction » de l’âme (donc sans dualité) avec ses bases divines (
archai) et il affirmait que chaque âme contient d’une certaine façon « le Monde Intelligible, les Dieux et les Démons, le Bien et toutes les premières formes de l’Être »
FUYONS NOTRE PATRIE (celle du Nouvel Ordre Mondial)
Notre patrie où ce monde totalement appauvri intellectuellement, en passe de devenir en une insécurité matérielle croissante, en croissance de se remplir de peurs et de haines aussi criantes que celles dans le 3è siècle (chrono.
Scaliger, avec
guerre du Péloponnèse, etc.), et donc de susciter des éveils de consciences.
Mais le « Fuyons notre patrie » est atemporel, puisque toute culture, païenne et chrétienne, est en mouvement vers l’Origine où le temporel et le spirituel ne faisait qu’UN, et formait la Véritable Paix.
« Fuyons notre patrie » s’entend comme le modèle du RETOUR DE L’ÂME « VERS SA PATRIE » ou ORIGINE. Un
Mircea Eliade parlerait
« d’éternel retour ».
[En référence à :
Païens et Chrétiens dans un âge d’angoisse - Aspects de l’expérience religieuse de Marc Aurèle à Constantin, de
Eric Robertson Dodds]
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