Depuis le temps que j’écris que le temps est une invention humaine, en voici une preuve dans les écrits du « Socrate en sabots » (l’âne), sous la plume du sage légendaire Nasr Eddin Hodja. En vertu du principe si salutaire des CROISEMENTS, seul le ridicule peut tuer la bêtise et restaurer la lucidité ! Encore une fois je cite le merveilleux conte Les habits neufs de l’Empereur, leçon de philosophie hautement active, car au milieu de cette foule idiote et moutonnière, seul l’enfant, l’idiot ou le fou sont à même de révéler la réalité. C’est précisément ce que s’efforce de faire le Hodja.

 

 

 

 

Notion de temps
LE CORBEAU

Nasr Eddin Hodja a attrapé un corbeau avec un filet et il l’a mis en cage. On s’en étonne :
- Quelle drôle d’idée tu as eue encore ! Tu ne sais donc pas que cet oiseau porte malheur ? Et il croasse de façon affreuse...
- Je le sais bien, répond le Hodja, mais c’est pour faire une étude. On dit que le corbeau vit deux cents ans et je veux me rendre compte par moi-même.
- Quel idiot ! Mais tu seras mort bien avant !
- Je suis moins idiot que tu ne crois. J’ai pris la précaution d’en attraper un qui a déjà cent quatre-vingt-dix-huit ans.

[D’après l’édition préparée et présentée par Jean-Louis Maunoury : Absurdités et Paradoxes de Nasr Eddin Hodja, Éditions Phébus]