Au sommet du Mont Meru, montagne axiale dans l’Himalaya, vers le Nord-Est, ce trouve un vaste continent très lumineux connu sous le nom de
Continent Blanc, sur la rive Nord de l’Océan de lait qui est du côté de la face Nord du Mont Meru.
Là, sur ce continent distant du Mont Meru de trente-deux mille
yojana (mesure ancienne de l’Inde, suivant les époques : entre 6 à 16 km), se trouvent des êtres qui ont un éclat lunaire étincelant, insoutenable à la vision par les sens même pour des sages ayant maîtrisés leur mental par une longue ascèse. Ces êtres sont dépourvus d’organe sensoriel depuis longtemps, ainsi ils ne prennent jamais de nourriture ni liquide ni solide ; ils ne frémissent pas et répandent un parfum suave.
Ces êtres, que tout mal a quitté, ont un corps et des os ayant la dureté du diamant ; leur hauteur et leur largeur sont égales ; leur tête est une forme de parasol, leur cri ressemble a un grondement du tonnerre. (Dans l’
Ancien Testament et chez les Dieux, Tonnerre = leur voix ; ces maîtres du Tonnerre ont des forgerons à leurs services, pour les outils et armes : sens de pourfendre les
« mauvais esprits ». Tonnerre = orage et pluie fécondante pour la végétation et les cultures).
Étant naturellement nu, ils ont quatre testicules égaux, et cent pieds striés comme la tige du Lotus. Ils pratiquent d’Instant en Instant
« la dévotion à l’Unique », c’est-à-dire qu’ils sont entièrement concentrés par l’adoration de la Divinité qui est le Refuge suprême de tous les êtres.
Ils ont dépassé le stade du Faire/Fer : activité (
rajas) et inertie (
tamas), pour n’être que
sattva (représente le Blanc de l’Instant et de la pureté, de la bonté, et une des trois qualités originelles [
guna]), pure existence lumineuse comparable à l’Eau primordiale.
Ils pénètrent dans le Dieu éternelle aux mille rayons, c’est-à-dire qu’il empruntent la Voie passant par le TROU ou Stargate, « Porte du Soleil » ou Voie de la Délivrance, mais d’où l’on ne revient pas sur Terre, donc grosse différence avec le « voyage temporel » qui n’est qu’un bidouillage du mental et du domaine de la f(r)iction, avec commencement et fin.
(Réf. au
Nârâyaniya Parvan, chapitre 2 et 5, en note du
Shiva-purâna, chapitre 13 :
Daksha et Nârada).
Le Continent Blanc est évidemment situé dans l’Âge d’Or, dans cet Âge du Non-agir ou
Wou-wei (Wuwéi) : le
"non-agir", ou plus vulgairement : le
"lâcher-prise". Tout ce qui se fait spontanément est supérieur à ce qui se fait volontairement et par calcule ou « savoir » (culture). Faire le vide pour faire le plein ! Le
Wuwéi est l'état de celui qui a atteint l'Union mystique (comparable au Nirvâna bouddhiste). Non-agir qui correspond à l’IMPÉRISSABLE et implique le désengagement de tous faire/fer
(1). Seul le monde spatio-temporel du périssable est fait pour tous les ego ou ‘je’ qui y pratiquent le faire/fer qui rouille.
Le faire/fer correspond à l’âge du CRÉDI-CRÉDO-CROYANCE, celui des religions et du passage des contrats, quand l’Univers n’a pas encore été
« plié sur Lui-même » (sur le Soi), C’est l’Univers de la majorité des êtres, qui consiste principalement en l’accomplissement des rites, comme acheter, consommer, faire et fer (vieillir, tomber en vieillesse, etc.), consiste surtout dans la dualité de cause et effet et en l’application de lois ou règles sans fin, en offrandes et oblations, en exécution de sacrifices qui doivent porter leurs fruits bénéfiques, soit tout ce qui renforce leur monde du temps et soutient leur ordre cosmique, et procure après la mort le séjour au paradis ou au ciel des Immortels, mais étant encore temporel, n’empêche pas le retour sur Terre lorsque le temps de jouissance du paradis est écoulé après l’épuisement des mérites acquis.
Sur le Continent Blanc, on peut dire que la
« religion » principale est celle du
Wou-wei ou désengagement (
nivritti, nivritti-mârga : voie du Non-agir]. En ne considérant que la Soi pur et simple, c’est le
nivritti ; « Si vous voyez le Soi avec le monde, c’est la
pravritti. En d’autres termes, le mental tourné vers l’intérieur (
antarmukhi-manas) est la
nivritti. Le mental extraverti (
bahirmukhi-manas) est la
pravritti. De toute façon, il n’y a rien qui soit séparé du Soi. Les deux sont identiques.
Il en est de même pour la hiérarchie spirituelle ; elle ne peut exister séparée du Soi. Elle est et reste toujours dans le Soi et comme étant le Soi. La réalisation du Soi est le seul but de tous », dit Ramana Maharshi à l’entretien 274 du 27-10-1936.
Le Non-agir permet donc de se libérer de l’HOTC (Histoire-Opinions-Temps qui coule) ou flot incessant des renaissances (
samsara) et, par le Renoncement ou Putréfaction, soit le Non-agir, et par l’intériorisation, le Non-agir rend son adepte à se fondre dans la Divinité.
CONTINENT BLANC = Tout est comme ça, ce que l’on cherche, on l’a au bout de son nez. Ce que l’on cherche, on ne le trouvera jamais pour la raison qu’il n’y a jamais rien à trouver… puisque Tout EST. Le Seul Réel est Ici et Maintenant, seulement dans l’Instant et pas ailleurs.
RIEN = NULLE PART, RIEN À CHERCHER OU À TROUVER : « Il ne saurait non plus être question pour moi, s’exclama la Déesse, d’atteindre quelque insurpassable Éveil authentique et parfait que ce soit ! Pourquoi ? Parce que l’Éveil ne se trouve nulle part. Nul ne peut donc l’atteindre » (
Soûtra de la Liberté inconcevable - Les enseignements de Vimalakirti).
LA RECONNAISSANCE DE L’ORIGINE PASSE NÉCESSAIREMENT PAR SA DISPARITION MÊME.
La disparition (Renoncement, Putréfaction) constitue la preuve même de l’existence, le EST ou la super Tautologie du « Je suis ce JE SUIS ». Super Tautologie elle-même une pensée issue du mental, comme le « Qui suis-je ? » : « Quand la source de la pensée ‘je’ est atteinte [LE PASSAGE, la
« Porte du Soleil » citée plus haut], la pensée s’évanouit et ce qui reste est le Soi » (entretien 130 du 6-1-1936).
La
« Porte du Soleil » et sans retour possible sur Terre : « Si nous maintenons toujours l’attention fixée sur nôtre Source [devenant ainsi nôtre Fontaine de Jouvence], l’ego s’y dissout, telle une poupée de sel dans l’océan. […] Quand le Destin ou résultat des actions de vies passées est épuisé, l’ego est complètement dissous et ne laisse aucune trace derrière lui. C’est la Libération finale » (entretien 286 du 18-11-1936).
Ce grand Paradoxe d'Être sans être est la racine même de l’intuition de l’Être, sa Fontaine de Jouvence ou Zéro indien. De la même manière on ne peut pas poser la question :
« Comment saisir l’ego ? », ce qui supposerait la dualité d’un sujet-ego voulant saisir ou contrôler l’objet-ego ! Comme si le voleur se transformait en policier pour procéder à sa propre arrestation. De cette manière, le mental continue à subsister, en est même renforcé, mais échappe à lui-même. De la même manière, « Chacun connaît le Soi [ou l’Instant], et pourtant ne le connaît pas. Étrange paradoxe ». (Réf. Ramana Maharshi, entretien 43).
Le Renoncement comme l’énonce Ramana Maharshi à l’entretien 80 du 3-10-1935 : « L’ego émerge, c’est le réveil. En même temps les pensées s’élèvent. Que l’homme trouve à qui appartiennent ces pensées. D’où proviennent-elles ? Elles ne peuvent provenir que du Soi conscient. S’en rendre compte, même vaguement, aide à l’extinction de l’ego. C’est alors que la réalisation de l’unique Existence infinie devient possible [comme celle des habitants du Continent Blanc]. Dans cet état il n’y a pas d’individus en dehors de l’Existence éternelle. Il ne peut donc plus y avoir de pensée de mort ni de lamentations.
Si l’homme considère qu’il est né, il ne peut pas éviter la peur de la mort. Qu’il cherche donc s’il est né ou si le Soi a quelque naissance. Il découvrira que le Soi existe depuis toujours [le temps n’existe pas],
que le corps qui est né se réduit à une pensée et que l’émergence d’icelle est la racine de tout le mal [c’est moi qui souligne].
Trouvez d’où jaillissent les pensées. Alors vous demeurerez dans le Soi toujours présent au plus profond de vous-même et vous serez libéré de l’idée de la naissance ou de la peur de la mort ».
La Seule Réalité ne se lève ni ne disparaît jamais. (Même entretien).
Dans l’entretien 286 cité plus haut : « Du Soi absolu, comme d’un feu, jaillit une étincelle. Cette étincelle est appelée ego. Dans le cas de l’ignorant, l’ego, dès qu’il se manifeste, s’identifie à un objet. Il ne peut s’empêcher de s’associer à des objets [dualité sujet-objet]. Cette association est
ajnana [ignorance]. Sa destruction est le but de nos efforts. Si ses tendances
« objectivantes » sont détruites, l’ego demeure à l’état pur et s’immerge dans sa source. La fausse association avec le corps est appelée
dehâtma-buddhi (l’idée
”Je suis le corps”). Cette idée doit être détruite si l’on veut avoir de bons résultats. […] L’ego à l’état pur est expérimenté dans l’intervalle entre deux états ou deux pensées. L’ego ressemble à une chenille qui ne quitte une feuille qu’après en avoir saisi une autre [ici il s’agit de la temporalité de l’idéation, comme la chenille progressant]. Mais sa véritable nature ne peut être trouvée que lorsqu’il n’est pas en contact avec des objets ou des pensées [
rejoint le fait que l’Être se totalitarise ou se réalise seulement À L’INSTANT DE SA PERTE, PERTE DE SON EGO, PREUVE ASBOLUE DE SON EXISTENCE]. Saisissez cet intervalle avec la conviction acquise par l’étude de l’
avasthâ-traya (les trois états de la conscience ».
L’oiseau Phénix ou Benou est le roi des oiseaux dans le Continent Blanc, car comme Feu, il se dévore lui-même afin de se perdre ou perdre son « ego » et ainsi re-naître ou NAÎTRE VRAIMENT pour accéder à la « Porte du Soleil ».
Ouroboros se dévore lui-même = RENTRER EN SON PARADIS OU EN SON SOI, RETOURNER À SA VRAIE NATURE.
Se délivrer du conformisme de cette mode de la « liberté d’expression » ou tyrannie de l’opinion.
Note.
1. « La connaissance sans pratique est supérieure à la pratique sans connaissance. La pratique jointe à la connaissance est supérieur à la connaissance sans pratique. Le renoncement aux fruits des actions ou les actions sans désir de récolter quoi que ce soit, dans le cas d’un Réalisé, est encore supérieur à la connaissance jointe à la pratique » (cité dans l’entretien 129, où découvrir la source de la pensée ‘je’ ou ego, c’est détruire l’ego. « C’est la réalisation du but, c’est la
prapatti [l’abandon de soi ou Renoncement], le
jnana, etc. »
Prapatti ou Renoncement, Putréfaction, aboutit à la Réalisation tout aussi bien que l’investigation « Qui suis-je ? ». « L’abandon total implique que vous n’ayez plus l’idée d’un ‘je’. Toutes vos prédispositions (
samskâra) sont alors balayées et vous êtes libres. À la fin de l’une ou l’autre voie, vous ne devriez plus vous sentir comme une entité séparée », dit le Maharshi à l’entretien 31 du 4-2-1935.
« Si vous pratiquez la
prapatti à Dieu, vous vous livrez à Lui et vous êtes donc à Lui et non plus à vous-même. Si Dieu a besoin d’un corps, laissez-Le en cherchez un pour Lui-même. Vous n’avez pas besoin de dire que Dieu a un corps » (entretien 327 du 13-1-1937).
Porte du Soleil à Tiwanaku, actuelle Bolivie.