Honey and Clover
Hachimitsu to Clover
ハチミツとクローバー
Sur que ça ne ressemble pas à mon école des Arts Appliqués, coincé entre l’ancienne prison du Temple (transformé en Carreau du Temple : le marché) et un petit square parisien, certes avec des beaux arbres, mais qui n’a rien à voir avec le somptueux parc que l’on peut admirer dans le drama, et où des étudiants en goguette emmènent dans un petit chariot Takemoto pour aller manger du curry. Mais il y a une immense queue devant le stand qui sert ce plat. Et il paraît que des étudiants étrangers ne viennent dans cette université que pour goûter à ce plat. Seulement ici ce n’est que pour les étudiants de première année. A l’insistance de ces deux copains, Takemoto se fait passer pour un élève de première année et reçoit le précieux plat de curry, effectivement ça l’air très appétissant !
Pour l’instant, s’il s’agit d’art, c’est plutôt de celui d’art culinaire, car Takemoto et ses deux copains se retrouvent en cuisine où se confectionne ces repas au curry. Nous sommes dans une comédie un peu fofolle, peut-être pour rappeler l’ambiance d’une école d’art ? Aux Arts Appliqués autant que je m’en rappel c’était plutôt une ambiance studieuse...
Fatigue automnale ou pas, je trouve au début difficile d’accrocher à ce drama, où la linéarité des situations ne me semble pas claire.
Takemoto retrouve dans un atelier du lycée la jeune fille au pétales de cerisiers qu’il avait croisé dans le parc telle une apparition, elle s’appelle Hanamoto Hagumi (joué par Narumi Riko), et va commencer sa première année dans cette université. Si elle semblait être une apparition pour Takemoto, c’est peut-être dû à sa timidité, à son aspect rêveur. Ici pour sa présentation elle ne fait pas dans la discrétion et est à l’opposé de son ramassage des pétales dans le parc : elle entre dans l’atelier en s’étalant au sol dans une grande flaque de peinture ! Au dire du prof qui la présente elle fait des tableaux très intéressants. Le scénariste insiste un peu lourdement et plusieurs fois, en répétant qu’Hagumi vient de la campagne, il n’y avait rien là-bas, et qu’elle découvre tout à Tokyo pour la première fois.
Enfin les autres copains de Takemoto se présente, à nous et à Hagumi. Il y a Morita Shinobu (joué par Narimiya Hiroki), 26 ans déjà, du département de sculpture et dans sa septième année à l’université ! et lui aussi couvert de peinture ; à croire qu’ici ils le font tous exprès de tomber dans des colorants... Morita veut réaliser des choses impossibles ! Ensuite vient Yamada Ayumi (joué par Harada Natsuki), en quatrième année de céramique. Enfin Mayama Takumi se présente (joué par Mukai Osamu), ici avec des lunettes, il est en architecture. Mais le contact passe avec Takemoto par un petit rien : un bouton de vêtement perdu dans le parc, Hagumi l’avait vu et elle le lui rend. (Je ne sais pas ce que fais Taketomo, peinture ? sculpture ?)
Aux Arts Appliqués (ENSAAMA) nous avions des cours de français, de maths, mais surtout de géométrie, de perspective, d’architecture, de dessin de nus et de natures mortes et de plâtres, de fresque, de laque, d’émail, d’orfèvrerie (avec Serge Mouille), de sculpture sur bois (avec Antoniucci Volti) et sur pierre et en argile, d’histoire de l’art, de publicité, etc. Heureuse période, car après, pour gagner sa vie... Comme colorant à l’époque (années 1960) nous n’utilisions qu’une matière ingrate : la gouache. Ingrate car le contraste de la couleur en gouache se modifiait au fur et à mesure que la matière séchait... Aussi j’ai découvert l’aquarelle... en dehors de l’école. Mais certains élèves pouvaient peindre à la peinture à l’huile chez eux... Les Arts Appliqués est une école complète, mais elle pouvait aussi préparé à l’école des Arts Décoratifs (ENSAD), ou à l’école des Beaux Arts, ou en esthétique industrielle où l’ENSAAMA avait une section importante et réputée. On entrait à l’ENSAAMA sur concours. Heureusement car je n’ai pas de bac. Mais il m’a fallu préparer ce concours une année... pas assez doué !
Je garde un souvenir heureux des cours du peintre Haramburu, qui portait des costumes aux couleurs toujours très recherchées, et où nous pouvions improviser avec nos gouaches autour d’une nature morte, ou des paysages dans Paris quand nous avions des sorties.
J’espère que le scénariste Kaneko Shigeki ne va pas nous faire le coup du petit génie à la Nodame Cantabile ! avec esprit de compétition en plus... Car cette Hagumi peint depuis qu’elle est enfant et elle n’a jamais eu de relation avec les autres. Elle n’a que la peinture dit-elle. C’est bien ça qui m’inquiète !
En tous cas, drôles d’école ou on fume des cigarettes. Pas bon le mélange de fumée et celui des odeurs de colorants. Enfin chacun s’empoisonne comme il lui plaît !
Voilà donc cinq personnes débutantes dans la vie, un peu « en vase clos », et qui vont échanger, tel est le but de la vie. Ne serais-ce qu’échanger de l’air, c’est déjà essentiel !... mais pas l’air des cigarettes... surtout en atelier...
On assiste à des discussions sur l’avenir du « groupe des cinq » dans la magnifique cantine, pardon le self de l’université. Le mien à l’ENSAAMA était la vraie cantine, avec repas indigestes... et bruyant... et petit. Discussions tournant, en gros, autour de savoir s’il faut travailler pour l’art, ou être un simple salaryman !?
Petit rappel tiré du livre de Jean Coulonval : Synthèse et Temps nouveaux.
Les ouvriers d’industrie sont mécanisés, ils sont les instruments de mise en œuvre d’une technique qu’ils n’ont pas eux-mêmes élaborée, à laquelle ils ne comprennent rien. Ils ne sont pas en situation de percevoir les choses de l’Esprit en filigrane, par transparence, au travers de leurs gestes, de leur travail. Ils travaillent, ils ne font pas une œuvre.
Ainsi celui qui travaille avec ses mains, par la force des choses, doit faire œuvre d’artiste, ou au moins d’artisan...
Le groupe des cinq semble devoir être autonome, ils ne peuvent pas aller chez leurs parents pour manger le soir, donc ils doivent se débrouiller. Une vie de bohème !
Le prof fumeur fait visiter à Hagumi des ateliers, on y voit une grande sculpture de Morita, très exubérante et torturée. Ça donne immédiatement des idées Hagumi qui se rue sur des tubes de couleurs et un chevalet. Pour faire la cuisine Morita se prend pour un génie. J’espère pour lui qu’il n’en fait pas de même avec ses sculptures, car il a déjà une sorte d’agent artistique qui veut l’exposer en dehors du Japon.
A mon goût cette séquence est outrée et mal joué par Narimiya Hiroki. Mais si Morita vend des sculptures ça permettra aux autres du groupe des cinq de manger mieux.
Grand jour... Hagumi présente le tableau qu’elle à peinte sous l’inspiration de la sculpture de Morita. Sa signature sur le tableau est énorme. Bonjour la modestie ! Si le talent se mesure à la grosseur de la signature, ou allons-nous ! Les peintres de l’Égypte ancienne ne signaient pas... L’instinct du « droit d’auteur » est une notion récente... et très matérialiste. Pour en revenir à maintenant et dans le drama, Morita trouve le tableau de Hagu (c’est la signature) génial et il court lui dire son admiration. Par exemple j’admire beaucoup le peintre bolognais Giorgio Morandi. Ses natures mortes sont de vrais paysages, et ses paysages de vraies natures mortes. Le mystère et la sérénité coulent dans ses œuvres.
Avec le rapprochement de Hagu et de Morita, devant Takemoto, laisse celui-ci dans l’embarras affectif.
On ne se gène pas pour cuire des pizzas dans un four à céramique à 5000 euros. Je n’ai pas peur que la puissance du four brûle les pizzas, mais j’ai peur des vapeurs et des possibles retombées de cendres et de pigments divers sur les pizzas ; ainsi la scène semble non réaliste.
A la vue de ce premier épisode où il est très peu question d’art, c’est léger, lourd par moments, il ne se passe pas grand chose, la musique est bouche-trous et fade, et les émotions ne sont pas là. Ça se veut kawaï (mignon) mais c’est plutôt poussif. L’ambiance générale se veut enjouée et rythmée comme First Kiss, mais elle est loin ici de l’égaler. Bref je me suis ennuyé dans ce « Club des cinq » coincé entre l’adolescence et la vie de salaryman, et qui semble très « en dehors de la plaque ». Ikuta Toma joue bien et il a une présence, un charme aussi ; je ne peux pas en dire dire autant de ses deux copains : l’architecte et le sculpteur qui fait pas sculpteur du tout. Narumi Riko elle aussi ne fait pas peintre malgré son entourage d’admirateurs, elle n’est pas impliqué dans son rôle et elle tient son pinceau comme le balai pour nettoyer la cuvette des WC, d’ailleurs son caractère est campé maladroitement scénaristiquement parlant. Bon par exemple, il y a une séquence charmante, quand la petite bande se rend au bord de l’océan, mais c’est léger léger, en plus au son de violoncelles. La romance s’installe doucement à la fin du deuxième épisode. Il faudra tenir les chassés-croisés affectifs pendant les neuf autres épisodes restant ; des modèles pour les jeunes lycéennes japonaises ? Une seule étoile pour l’ensemble du sujet sur ce prétexte d’école d’art !
Michel Roudakoff
Note.
1. Site de l’école ENSAAMA : http://www.ensaama.net/HTTP/OdS_HTML/ODS-FR/Accueil-Page.html
A Paris avant 1969, l’école des garçons était situé rue Dupetit-Thouars, et celle des filles rue Duperré en plein quartier de Pigalle.
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Dernière mise à jour : 31-10-2008 14:58
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