Faire de l'animation de dessins
 

Ecrit par Sechy, le 15-04-2008 13:04

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Publié dans : Présentation de la technique, Faire de l'animation

Tags : Animation, dessin, dessin animé

Faire de l'animation de dessins ? En tous les cas : jamais utiliser de ligne droite !

L'animation est l'art de conférer le mouvement apparent aux objets ou aux dessins.

Sur cette page et les trois suivantes, il est décrit quelques méthodes, conseils et principes pour réaliser une bonne animation ; à la base, sur papier, pour pouvoir ensuite éventuellement la transposer sur ordinateur avec des logiciels graphiques.

 

les_sacs.jpg
 
 

planim_sac.jpgINERTIE : sous son action, tout tronçon d'un objet en mouvement se bombe dans le sens du mouvement. Et lorsque le mouvement change de sens, la ligne droite se recourbe en direction opposée. pour les dessins intermédiaires (intervalles), il ne faut pas dessiner le passage d'une courbe à l'autre, à plus forte raison si le mouvement est rapide. Il suffit d'intervertir le sens de courbure.
Dans le cas où il faut animer le changement du sens de courbure, ayez recours au principe ondulatoire, ET N'UTILISEZ JAMAIS LA LIGNE DROITE COMME POSITION INTERMÉDIAIRE. 

Le célèbre sac de farine à moitié plein, le guide du volume donnant n'importe quelle forme animable, et la preuve que des attitudes peuvent être réalisées avec la plus simple des formes. (Toujours la simplicité, toujours toujours). En aquarelles, peindre des pommes de terre est excellent. [ Les dessins des sacs sont de ma main ]

The famous half-filled flour sack, guide to maintaining volume in any animatable shape, and proof that attitudes can be achieved with the simplest of shapes. (Always simplicity, Always Always). In watercolours, to paint potatoes is excellent.

Les expressions du sac - Forms of the half-filled flour sack :
1 Pressé et étiré et tordu. (Squashed & stretched & twisted)
2 Déprimé, joyeux, de mauvaise humeur, curieux. (Dejected, joy, tantrum, curious).
3 Suffisant arrogant, plié de rire, agressif, riant. (Cocky, laughter, belligerent, more laughter).
4 Pleurant, heureux. (Crying, Happy).
Ci-contre, les dessins des sacs utilisés pour l'animation du sac en gif animé. Animation dessinée ensuite à la souris avec des logiciels graphiques. Un crayon et du papier seront toujours nécessaires ; l'informatique restant un outil. Ce guide du volume du sac de farine à moitié plein, est un modèle utilisé par les studios Disney.

 

 

 

 

Ensuite : Utiliser le principe ondulatoire - La ligne droite n'existe pas en animation.

 pl_onde.jpg

courb.jpg Le mouvement d'une onde se prête très bien à l'animation, en faire un usage constant pour avoir un beau résultat.

Une main tenant la corde. La main soulève le bout, et fait un mouvement brusque vers le bas. Lorsque la main commence le deuxième mouvement vers le haut, la corde continue encore à descendre sous l'action de l'INERTIE. Lors du deuxième mouvement de la main vers le bas, les deux mouvements - ascendant et descendant - de la corde continue. La main lui a donné vie.
La première onde a parcouru la corde ; d'autres lui succèdent. En animation, il n'y a jamais de position intermédiaire où la corde est rectiligne. Pour vaincre le mouvement de la corde, il faut une force considérable afin de vaincre l'inertie du mouvement.

Quand la crête de l'onde se déplace de A à B, la position intermédiaire sera en C : la crête se déplacera le long d'une ligne réunissant les deux positions de base.

Faite l'expérience : tracez une onde sur une longue bande de papier. Placez sur cette bande une petite feuille de papier percée d'une fente verticale.
En déplaçant la feuille avec la fente le long de la bande, on verra dans la fente une ligne monter et descendre d'une façon bien plus agréable que s'il s'agissait d'une simple ligne droite oscillante. Faire de l'animation ondulatoire, c'est l'eyes candy, ou du bonbon pour les yeux !

Matériel pour dessiner l'animation.

crayon_tr.gif

 

 

 

 
table_anim.jpgTable d'animation
La table d'animation. Elle comporte des ergots de repérage et le plan de travail est éclairé en transparence au travers d'un verre dépoli.
Pour que les dessins soient correctement repérés les uns par rapport aux autres, et en se suivant, il faut des perforations.
La table d'animation est très facile à construire : une planche en bois de 45 cm x 60 cm environ et inclinée correctement avec des cales en bois. L'ouverture de la planche mesure une peu plus que le format du papier d'animation : par exemple de l'Extra-Strong (ce papier possède une bonne transparence, a un grain agréable pour le crayon et se gomme facilement) en 21 cm x 29,7 cm, l'ouverture peut être de 25 cm x 35 cm. Sous le verre, on place une petite ampoule électrique, commandé par un graduateur de lumière afin de ne pas fatiguer les yeux.

 

pegbar.jpg La pegbar ou barre à tenons en français. Lorsque l'on n'est pas riche, on peut acheter une simple perforatrice de bureau à deux trous ronds, mais de meilleure qualité si possible. Les deux ergots de repérage peuvent être des bouts de manches de pinceaux usagés passés soigneusement au papier de verre, afin de les ajuster au mieux dans les trous du papier d'animation. Collez avec de la colle forte les deux ergots sur un petit carton fort et selon l'écartement des trous de la perforatrice, puis scotchez cette barre à tenons sur le bord de la vitre de la table d'animation. Lorsque l'on fait de l'animation pour le film argentique, au banc-titre, il faut le même jeu de barre à tenons que celui qui a servi à l'animation.

 


Ci-dessous, une mire pour établire des mouvements de caméra, avec en bas les perforations : une ronde au milieu et deux rectangulaires ; c'est le standard de beaucoup de studios d'animation.

mire_anim.jpg

 

cadre.jpg Le cadre. Pour bien maîtriser l'espace dans le champ de l'action de l'animation, là où se déroulera tous les mouvements : tracez le cadre, soit sur du papier noir, ou plus simplement tracez le cadre au crayon de couleur rouge par exemple.
Le rapport du cadre s'établit par exemple dans le cas du format 1,37 (3/4) avec une fenêtre caméra de 16 mm X 22 mm :

    A = Longueur - B = Hauteur
    A/B = 1,37
    A = 1,37 X B
    B = A/1,37

Le format panoramique est le 1,66.
Ou encore le 1,85.
Le format anamorphotique est le 2,35.

Et enfin, pour se rendre compte de l'animation et du rythme, utilisez la persistance rétinienne de l'œil : feuilletez (flipper) constamment le jeu de dessins : d'abord le dessin terminé et celui de dessus sur lequel vous travaillez ; puis "flippez" le troisième dessin en cours et posé au-dessus des deux premiers... et ainsi de suite, selon la dextérité de vos doigts. Le flippage ou feuilletage est le geste instinctif de l'animateur. Au final, en dehors de la table d'animation, on peut prendre dans sa main au moins 50 dessins ou plus, et les feuilleter assez facilement ; l'enchantement doit se produire ; si ce n'est pas le cas, se remettre à la table d'animation !



L'animation est l'art de conférer le mouvement apparent aux objets ou aux dessins.
    

L'observation minutieuse du temps et du rythme des mouvements est aussi importante que la décomposition du mouvement lui-même.
La vitesse du mouvement sur l'écran dépend du nombre d'images qu'il occupe sur le film, et la vitesse à laquelle le film est projeté. (Aussi valable en animation par ordinateur !).

Aide-mémoire de subdivision du temps en image argentique.
    1/24 seconde = 1 image
    1/12 seconde = 2 images
    1/8 seconde = 3 images
    1/6 seconde = 4 images
    1/4 seconde = 6 images
    1/3 seconde = 8 images
    1/2 seconde = 12 images
    2/3 seconde = 16 images
    3/4 seconde = 18 images
    1 seconde = 24 images

(Note : Pour faciliter l'exécution des dessins, on fait seulement 12 dessins pour une seconde de mouvement : ils sont filmés 2 fois. On mélange aussi tantôt les dessins image par image (cas de mouvement rapide), et les dessins en double images. Pour enchaîner la fluidité en double images, on peut utiliser le fondu enchaîné à la prise de vue).

Avant de commencer une animation, décider de la vitesse totale de la scène, puis des mouvements principaux ou d'ensembles. A partir de cela, on va connaître le nombre de dessins nécessaire pour reproduire l'action sur l'écran.

Il faut développer en nous la division du temps.

danse_magogr.jpg

 

Ensuite détailler le mouvement, et se munir d'un chronomètre.
Chaque mouvement est un nouveau problème. Quand on a une action compliqué, il est bon de mimer le mouvement soi-même.
Visualiser quelques scènes de dessins animés en essayant de repérer leur principales phases de mouvement.
Pour les courtes durées, essayez de diviser une seconde en différentes fractions en battant la mesure. Par exemple, d'une main battre les secondes et de l'autre battre les demies mesures, soit 12 images. Changer la vitesse : doubler, 4 battements par seconde = 6 images. Doublez encore : 8 battements par seconde = 3 images.
Employez aussi les cadences. Ci-dessus vous pouvez voir une esquisse d'une petite danse de Mister Magoo, relevée sur une visionneuse à partir d'un film en 8 mm. Pour chercher un jeu de mouvements, dessiner plusieurs positions d'un petit personnage en fil de fer est assez utile. Selon sa propre expérience, esquisser : soit en plusieurs dessins sur plusieurs feuilles de papier sur la table d'animation, soit les dessins côte à côte sur une même feuille de papier comme ci-dessus.

cadence.jpg

Pour rythmer l'animation, on utilise sur sorte d'échelle appelée CADENCE. Celle-ci est dessinée sur les dessins clés, afin d'indiquer les intervalles de dessins à créer. Sur l'exemple ci-dessus, entre le dessin de départ et le dessin final comportant un fixe, il est indiqué trois intervalles : donc deux dessins filmés à deux images, et un seul dessin filmé une image.  


cadence1.jpg

Un autre exemple de cadences pour dégager l'action. On peut les dessiner à la verticale ou à l'horizontale.

Pour animer :
1 - Méthode indirecte : Dessinez d'abord les croquis de bases ou dessins clés ou extrêmes : les commencements et fins de chaque mouvement. Toutes les positions où mouvements d'une partie quelconque du personnage ou de l'objet mobile qui s'arrêtent où changent de direction sont des extrêmes ou dessins clés.

2 - Méthode directe ou ondulatoire : Pour avoir une meilleure fluidité, un contrôle meilleur et une vue d'ensemble, il est mieux d'esquisser tous les dessins du mouvement, quitte à reprendre par la suite pour ajouter un intervalle ou dessin entre deux dessins du mouvement. Avec cette méthode, on a ainsi la pleine expression de la ligne ondulatoire et du sac de farine à moitié plein décrite page précédente. C'est cette méthode que préconisait Walt Disney à ses animateurs.

Les défauts à éviter :

- Le papillotement : mouvements irréguliers de personnage et objets sur l'écran, provoqués par les défauts d'animation, de dessin, ou de prises de vues.
- Filage optique : clignotement ou dédoublement d'images sur l'écran, provoqué par des images que l'œil retient trop longtemps. Le mouvement des objets de tons tranchants avec le fond, ou le mouvement ne s'harmonisant pas avec la forme des objets donne souvent lieu au filage optique.
Par exemple : si la caméra fait un rapide mouvement panoramique à travers un paysage comportant un objet vertical de grandes dimensions, tel qu'un poteau télégraphique ; cet objet semblera filer sur l'écran dans le sens du mouvement. L'écart entre les images successives du poteau sera trop grand pour que nos yeux puissent s'en accommoder. C'est cela le filage optique.
Souvent, on doit modifier les dessins et changer la forme du volume en mouvement pour la rendre plus acceptable à l'œil. Donner du eyes candy, charmer, comme indiquait Fred Moore, l'un des meilleurs animateurs des studios Disney des années 1930 - 1950.
A mesure que la vitesse du mouvement augmente, la déformation nécessaire devient plus importante, étant donné que l'œil est appelé à combler des lacunes de plus en plus grandes entre les dessins successifs.
On peut utiliser l'astuce des filets de vitesse, où ceux-ci suivent le volume en mouvement.

 

Filets de vitesse

 

Les tracés de vitesse :
1 - Vitesse uniforme.
2 - Vitesse avec variations.
3 - Tracés de vitesse en mouvement curviligne.
 

 
Quelques principes du mouvement. (Apprendre par cœur !)

    1 - Un corps en repos tend à rester en repos. Un corps en mouvement tend à rester en mouvement. (Par exemple : un décor animé par moirage doit poursuivre ce moirage pendant tout le plan).
    2 - Les états de repos et de mouvement d'un volume ne peuvent être modifiés que par l'action d'une force extérieure. Le volume se déplace en ligne droite dans la direction dans laquelle la force est appliquée, jusqu'à ce qu'une autre force n'agisse pour modifier cette direction.
    3 - Chaque action provoque une réaction égale et de sens contraire.

Pour l'emploi des lignes ondulatoires et de l'inertie si importante, les personnages doivent-être conçus de façon à pouvoir être comprimés et étirés en toutes sortes de formes (le sac de farine), et rester cependant reconnaissables. La est aussi l'art du dessinateur. L'effet d'inertie est la base même de l'humour en dessin animé.
Le degré de déformation et le nombre de dessins nécessaires pour l'obtenir dépendent de trois caractéristiques inhérentes aux volumes eux-mêmes.
1 - La vitesse avec laquelle ces volumes se déplacent lorsqu'ils viennent en contact avec la force qui les arrête, ou la force qui leur imprime le mouvement.
2 - Le poids (ou la masse) de ces volumes.
3 - La matière de ces volumes et, particulièrement leur élasticité. Attention cependant de ne pas tomber dans l'animation chewing-gum de certains anciens dessins animés.
 
 Mouvements ondulatoires et courbes de sens contraire.
 
model1.jpg

Deux ballons réunis forment un corps plus ou moins ovoïde, qui peut être facilement cintré au milieu. Cela fait un corps humain ou animal. On peut multiplier les personnages en utilisant des ballons de différentes dimensions. La même chose s'applique aux têtes. Des formes simples permettent de construire une variété infinie de personnages. Se rappeler constamment des formes simples de base quand les détails viennent habiller le personnage terminé. (Penser au sac de farine à moitié plein !) Penser en volume, mais on peut traiter les yeux comme des surfaces plates, comme le petit crayon bleu en haut de page par exemple.
 
model2.jpg

Le schéma ci-dessus montre les proportions d'un personnage. L'unité de mesure est ici la moitié de la hauteur de la tête. En animant, se rapporter constamment au modèle, et avec la pratique, on peut ensuite déformer le personnage sans pour autant perdre les caractéristiques du modèle.
 
imh_modl.jpgimh_costum_trnoir.gif

Ci-dessus, une esquisse sur un coin de table d'Imhotep, petit personnage de mon site, avec à ses côtés la forme schématique de base.. (Ceci est vraiment une ébauche à retravailler !) Pour l'instant il n'est pas animé !... Tout au moins en dessins...

En montrant un volume en mouvement au début et à la fin de sa course, il faut se rappeler qu'une partie de l'objet commence toujours à bouger un peu AVANT les autres et cesse de bouger plus tôt que les autres.
La force ou l'impulsion est transmise par la matière du volume et agit successivement sur chacune de ses parties. Donc bien mémoriser l'architecture des volumes simples composants un personnage ou un objet.
Ainsi chaque partie refuse à se mettre en mouvement, voire à s'arrêter, jusqu'à ce qu'elle se trouve contrainte à le faire.
La première partie à se mettre en mouvement ou à s'arrêter est celle à laquelle la force est appliquée directement. Ces effets apportent humour et fantaisies aux dessins animés.

Changement de direction.
Lorsqu'un volume en mouvement change de direction, la deuxième des lois du mouvement entre en jeu. Un volume se meut dans la direction de la force qui lui a imprimé le mouvement, et seule une autre force, s'exerçant dans une autre direction, est capable de modifier sa course.

Application de la troisième loi.
Par exemple, un homme doit traverser l'écran à une allure folle : il fera quelques petits pas en arrière avant de prendre de l'élan. Lorsqu'il passera en trombe à côté d'un arbre, le vent soulevé par son passage fera fléchir l'arbre, qui reviendra à sa position normale quand l'homme sera déjà loin.

Présenter chaque mouvement comme la succession de trois phases :
PRÉLUDE
ACTION
CONCLUSION
et employez les cadences.

Observez beaucoup de dessins animés, les analyser, les regarder image par image.

Voir aussi la page Banc-titre.
Voir aussi la page du "POPE ALEXIS".

[Adaptation et résumé en 1964 par Michel Roudakoff, d'un excellent petit livre, véritable Bible, paru en 1952 aux Éditions Tiranty : "Comment faire des dessins animés d'amateurs", de Halas et Privett ; traduction d'un livre de Focal Press, Londres]

© Michel Roudakoff
 
crayon_trjo.gif
 
 

Dernière mise à jour : 15-04-2008 22:02

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