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Le chant glagolitique accompagnant l’entrée du vieux Pharaon, le père
de Ramsès, n’est pas du tout déplacé, car ce style de chant hiératique
date du haut Moyen-Age européen, période particulièrement tournée vers
le spirituel, et une grande liberté de penser, avant que le clergé
catholique n’y vienne imposer une censure vers le milieu de l’an 900.
De toutes façons, à moins de mettre une musique du 20è siècle avec les
risques que cela comporte, nous ignorons tout hélas de la musique que
pouvaient jouer les Anciens Égyptiens, même la musique Copte est d’une
très faible indication. La vision subjective du vieux Pharaon assis sur
sa chaise à porteurs, et passant devant tous ses courtisans et une
enfilade de portes plus dorées les unes que les autres est superbe.
Nul par dans les reconstitutions du cinéma américain il ne se trouve le
réalisme stupéfiant de la reconstitution du film de Kawalerowicz. Ce
n’est pas une copie servile, mais une sublimation, une imitation
soignée certes mais peut-être faite de bric et de broc ce qui la rend
plus vraie que nature ! Ce mélange de son du Moyen-Age, de décors et
accessoires du 20è siècle avec les ruines de l’Égypte ancienne rendent
mieux que la réalité. Mais ni vous ni moi n’avons été passer nos
vacances il y plus de 2000 ans, alors laissons nous transporter en
rêves dans ce chef d’œuvre...
La séquence avec la vestale Kama est très sensuelle, érotique même, et
ressemble à un ballet dans cette ambiance sombre de teintes de gris
bleutés chauds du Temple, où ne vacille qu’une petite flamme sacrée.
Les intrigues de couloirs sont cruelles et assez tordues !
Comme écrit plus haut, on ne dispose pas de référence pour la musique
de l’Égypte ancienne, aussi pour accompagner une fête, Kawalerowicz
utilise habilement une rythmique avec de discrètes percussions. On sait
plus ou moins que les musiciens de ce temps utilisaient beaucoup de
percussions comme les cymbales, tambourins et autres dispositifs
frappés. La harpe était joué par des musiciens aveugles, dont on
possède de multiples représentations sur des fresques ou des papyrus.
Visuellement c’est superbe, car Kawalerowicz filme en caméra portée,
comme pour rendre un doux et sensuel enivrement par la bière et les
désirs.
Ah la séquence de bataille : soldats comme on peut en observer sur des
fresques, avec leur casque tressé de grosse fibre végétale plus ou
moins protectrice pour le crâne, large bouclier d’une main et longue
pique de l’autre, et tous avancent au son d’un chant poétique porté par
la voix forte d’un seul homme. Ce qui est beau et impressionnant, comme
dans la façon dont Orson Wells met en scène une bataille, c’est de voir
Kawalerowicz nous montrer longuement la marche des soldats vers le camp
adverse, en plans serrés, objectif souvent dirigé vers le sol, sur
lequel de temps à autre un soldat s’effondre victime d’un projectile,
ou un autre vacille prêt a tomber. Tous ça est renforcé en plus du
chant, par le bruit des pas sur le sable, l’essoufflement des soldats
dans leur progression et leurs cris pitoyables lorsqu’ils tombent
blessés, plus la vision subjective en volet de transition grâce à la
fermeture des paupières rougeoyantes d’un mourant. La manière de filmer
la désolation de la répartition géométrique des morts sur le champ de
bataille est très esthétique. Souvent les plans ressemblent aux
fresques égyptiennes colorées et très détaillées.
Seuls plans qui jurent un peu : deux chars de Pharaon devant l’état
actuel des grandes pyramides sans leur revêtement original. Mais ça
peut passer, vu qu’ici nous en sommes déjà à la XXe dynastie et les
plans sont très courts. Ramsès dit que la pyramide de son prédécesseur Khéops
(IVe dynastie) était le fruit de sa volonté toute puissante. À mon avis
il y a une erreur, c’est plutôt l’expression de l’éternité, ou du
prolongement de la vie dans un autre plan.
Dernière mise à jour : 08-04-2008 14:08
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